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Arts et culture

Un cabaret trendy–trash, signé Les Poids Plumes

23 février 2015

– Par Didier Pilon –

Un cabaret trendy–trash présente une série de courtes pièces qui entremêlent différents registres théâtraux. Mettant en vedette des textes de plusieurs auteurs qui varient autant en style qu’en contenu, cette mise en scène de Lisa L’Heureux se donne comme mission de représenter l’ensemble du fait vécu dans la région d’Ottawa-Gatineau.

Lors du spectacle Anthologie Diasporeuse, Gabriel Robichaud a démontré qu’il est bien possible d’arpenter les rues de Moncton en plongeant de plein gré dans la poésie acadienne. Toutefois, exception faite de quelques poèmes de Robert Dickson, il semble que les quartiers d’Ottawa ne font pas encore l’objet d’un corpus de la sorte. C’est peut-être avec cette lacune en tête que le collectif d’auteurs Les poids plumes s’est mis au défi de représenter la vie à Ottawa.

La nature de ce projet est de sorte à présenter des visions divergentes et des performances inégales. Les meilleurs moments étaient tout ce que le théâtre se doit être : une fenêtre dans la vie de personnages qui touche, fait autant rire que penser et offre une nouvelle perspective sur une réalité partagée. La mise en scène coulait en toute douceur et les performances dramatiques étaient tout simplement émouvantes. Outre le talent surréel et bien connu de Marie-Eve Fortier, Louis-Philippe Roy a réussi à incarner des personnages si différents d’une pièce à l’autre qu’on croyait y voir un comédien distinct. En particulier, une performance poignante de Josianne Lavoie a fait frémir en présentant un personnage si bien incarné qu’on ressent à la fois la beauté et la tristesse de son enfance éparpillée dans des motels cheaps.

Toutefois, les failles de certaines pièces étaient aussi décevantes que troublantes. Parsemées de discrimination à l’égard de plusieurs groupes sociaux, elles jouent sur des clichés sans aucune subtilité et perpétuent des stéréotypes aussi méchants que honteux. Une pièce en particulier dépeignait le « Gatinois dans son habitat naturel » avec à peine plus de sensibilité culturelle qu’Adam Sandler dans You Don’t Mess with the Zohan. En caricaturant les personnages au point de les dérober de leur humanité, il semble que la pièce ne cherchait qu’à justifier son propre sentiment de supériorité.

Le traitement des Franco-Ontariens, quoique très différent d’une pièce à une autre, n’était parfois pas mieux. Outre les accents exagérés au point de sonner niais, un commentaire présente cette communauté linguistique minoritaire dans le rôle de l’agresseur. À Ottawa, prétend-il, les Ontariens forceraient sans cesse les Québécois de justifier leur appréciation de la culture franco-ontarienne. Ensuite cette phrase si souvent répétée : « Je suis une Franco-Ontarienne adoptive ». Comment dédaigner plus une culture qu’en se l’appropriant en cinq petits mots, comme si elle n’avait aucune complexité, comme si elle n’était pas une vraie culture? C’est à en faire bouillir le sang.

Bref, avec autant de talent sur scène, les bons souvenirs du Cabaret se mélangent aux mauvais, tout comme les meilleures expériences à Ottawa se mélangent inévitablement aux pires.

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