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L’ENFER DE LA DISTRIBUTION DE LA U-PASS
Par Yasmine Mehdi
Que le UCU soit bondé pendant la rentrée n’a rien d’extraordinaire : l’achat des manuels, la présence de kiosques et la distribution du U-Pass sont des évènements ponctuels qui font du Centre universitaire un carrefour par lequel les étudiants doivent impérativement passer. Cette année toutefois, tous ont remarqué que la densité de population du UCU battait des records. À qui la faute ? Sûrement aux interminables files d’attente pour l’obtention de la U-Pass. Étudiants, ancien distributeur, membre de l’exécutif de la FÉUO et gestionnaire de la OCTranspo ont tous eu leur mot à dire pour tenter d’expliquer ce fiasco logistique sans précédent.
Un coup d’envoi raté qui donne le ton
Il faut dire que le U-Passgate était prévisible, et ce, avant même le début de la distribution. Le budget de la Fédération étudiante de l’Université d’Ottawa (U d’O) en était un premier indicateur : il indiquait une diminution des fonds alloués aux salaires de 120 000$ à 84 500. Ainsi, comme confirmé par Vanessa Dorimain, vice-présidente des affaires universitaires responsable du U-Pass, les distributeurs sont passés de 70 l’an dernier à 35 cette année.
Par ailleurs, la FÉUO n’a commencé la distribution que le 29 août, avec une semaine de retard. « Nous devions commencer la distribution le 22 août […], mais les cartes ne sont pas arrivées à temps », a expliqué Dorimain. Un retard que la Fédération étudiante a peiné à rattraper, surtout à cause des heures d’ouverture qu’elle proposait initialement.
En effet, les stations n’étaient ouvertes que les jours de semaine de 10h à 17h [19h les mercredis]. « C’était une grande erreur de ne pas ouvrir la fin de semaine et le soir, surtout pour les étudiants qui travaillent. La première semaine est décisive, c’est là où il y a le plus de monde et malheureusement, c’est là où les horaires étaient les moins flexibles », a décrié Chen-tao, étudiant en science politique et en administration publique ayant travaillé en tant que distributeur de 2012 à 2015. « La FÉUO ne semble pas mettre beaucoup de réflexion dans ses décisions, c’est l’impératif d’économiser qui donne le ton », a-t-il ajouté.
Après avoir constaté l’ampleur de la gronde étudiante, la FÉUO s’est vue contrainte de modifier ses heures d’ouverture, comme l’explique Dorimain : « Nous avons prolongé nos heures d’ouverture de 8h à 20h [incluant le week-end] et nous avons augmenté le nombre de stations de distribution. »
Des employés loin d’être triés sur le volet
Lorsqu’elle s’est présentée au UCU, Laura Cuore, étudiante en théâtre et en théologie, a entendu dire qu’elle devrait attendre neuf heures pour obtenir sa carte. Dans le cas de Manon Arbour, étudiante en droit, on parlait de six heures d’attente. Que diraient ces étudiantes, deux parmi des milliers, si elles apprenaient que les distributeurs n’avaient reçu qu’une formation sommaire? Que dans certains cas, ils n’étudiaient pas à l’U d’O et avaient obtenu le poste grâce à un ami?
Après avoir travaillé quatre ans en tant que distributeur, Chen-tao dénonce aujourd’hui un processus d’embauche peu transparent : « Lors du premier entretien, lorsque j’ai dit que je connaissais la coordinatrice de l’exécutif, ça a clairement facilité les choses. La plupart des distributeurs étaient de bons amis des employés permanents de la FÉUO, plusieurs n’avaient rien à voir avec la communauté universitaire. »
Lorsqu’interrogée sur les critères d’embauche, plus précisément sur l’obligation des employés d’être des étudiants, Dorimain a esquivé la question en assurant simplement que plusieurs anciens employés avaient été contactés et que de nouveaux avaient été embauchés.
Chen-tao soutient pour sa part ne pas avoir reçu de courriel l’invitant à réintégrer l’équipe des distributeurs, contrairement aux autres années. « S’il y avait de nouveaux employés, j’espère qu’ils étaient bien formés, mais j’en doute. En 2012, la formation durait trois heures et elle était sérieuse. Avec le temps, elle l’est devenue de moins en moins; l’an dernier, elle n’a duré que trente minutes », a-t-il ajouté.
L’herbe est plus verte à Carleton
Du côté de Carleton, Fahd Alhattab, président de la Fédération étudiante CUSA, est catégorique : « Une situation similaire est impensable pour nous. Lors des jours les plus achalandés, je dirais que le temps maximum d’attente est de 45 minutes. » Quelle est l’explication de ce miracle? Un partenariat entre l’administration de Carleton et son association étudiante.
En effet, les étudiants reçoivent leur U-Pass en même temps que leur carte étudiante. La même photo est utilisée, et la plupart des cartes sont pré-imprimées pendant l’été et classées en ordre alphabétique. La distribution est ainsi beaucoup moins longue, et surtout moins coûteuse.
Pour OCTranspo, cette façon de faire est complètement réglementaire puisque, comme l’explique Pat Scrimgeour, directeur général adjoint du Système client et de la Planification, « la seule exigence qu’OCTranspo impose est qu’une photo apparaisse sur le U-Pass ».
« Quand on délègue une compétence, on peut perdre de l’influence. Nous nous sommes demandé si le plus important était l’expérience des étudiants, ou le pouvoir de l’association. Pour le U-Pass, nous avons jugé qu’il fallait être le plus pragmatique possible », a déclaré Alhattab. Un exemple que la FÉUO pourrait étudier, si elle veut éviter un deuxième U-Passgate l’an prochain.