Par : Camille Ducellier – Cheffe du pupitre actualités
Isolée et oubliée, le Nunavik est la région du Québec avec la population la plus vulnérable lorsqu’il est question de santé mentale. La région habitée par 12 000 personnes a le taux de suicide le plus élevé au pays.
Durant les dernières semaines, deux autre suicides ont durement frappé la région de Kuujjuaq. Le député d’Ungava, Denis Lamothe, s’est rendu sur place pour « prendre acte de la situation » et pour « soutenir les communautés autochtones ». En effet, c’est après la mort d’un enfant, encore à l’école primaire, que le président du conseil scolaire régional, Robert Watt, a demandé une rencontre d’urgence. La ministre responsable des Affaires autochtones du Québec, Sylvie D’Amours, ne s’est quant à elle pas déplacée pour la rencontre d’urgence de deux jours avec des représentants des communautés autochtones.
Lorsqu’on s’attarde aux statistiques canadiennes sur les taux de suicide, il est frappant de constater l’écart énorme entre les suicides de membres de communautés autochtones et les populations non-autochtones. En effet, sur 100 000 personnes, 24 hommes non-autochtones vont s’enlever la vie. Si l’on se tourne vers les hommes faisant partie des Premières Nations, c’est 126 personnes sur 100 000 qui sont victimes de suicide. De plus, les statistiques nous démontrent encore une fois que ce sont les communautés inuites qui sont les plus touchées par les pensées suicidaires. En 2012, 23,1 % des hommes inuit ont indiqué avoir des pensées suicidaires, en comparaison avec 11,1 % pour les hommes non-autochtones. Parmi les statistiques disponibles sur le suicide dans les communautés autochtones, l’âge où les jeunes sont le plus enclins à s’enlever la vie est la plus alarmante. En effet, dans les communautés isolées comme au Nunavik, ce sont les jeunes de 13 à 18 ans qui ont le plus haut taux de suicide.
D’ailleurs, plusieurs communautés inuites, en plus de faire partie du « tiers-monde canadien », sont tout à fait isolées, inaccessibles par la route, et n’ont donc pas accès aux ressources nécessaires pour faire face aux défis de la santé mentale. Les services de santé mentale sont effectivement très restreints dans les communautés isolées du Nunavik ; les psychologues, rarement disponibles, fonctionnent sur un système de Fly-in fly-out, et ne sont pas assez nombreux pour répondre à la demande dans le nord du Québec.
Lors de la rencontre d’urgence pour discuter de pistes de solutions, plusieurs suggestions ont été apportées. Par exemple, davantage de partage d’information sur les sujets liés à la santé mentale, un meilleur accès à des traitements pour les victimes d’abus sexuel, plus d’activités qui intègrent les traditions autochtones pour les jeunes, ainsi que l’élaboration de stratégies anti-intimidation sont des mesures qui devraient être mises en place pour remédier à la crise.
Malgré les statistiques effrayantes, les communautés du Nunavik ne perdent pas espoir, et continuent à élaborer des stratégies et des programmes pour que les jeunes s’accrochent à leur héritage et s’impliquent dans leur communauté. Toutefois, ces efforts seraient certainement encouragés si ces communautés avaient un meilleur accès aux ressources en santé mentale.