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Suspension des programmes de langues modernes

5 novembre 2018

Par Maeve Burbridge, journaliste 

L’Université d’Ottawa prévoit suspendre temporairement son département de langues et littératures modernes dans le but de concevoir un nouveau programme regroupant toutes les disciplines du département.

La cohorte de cette année sera la dernière pour le département de langues et littératures modernes de l’U d’O jusqu’à ce que les programmes subissent les modifications voulues par l’Université. D’après Joerg Esleben, directeur du département de langues et littératures modernes et professeur d’allemand, le département serait suspendu indéfiniment : « La suspension de nos programmes est sans terminaison définie, jusqu’à ce que les modifications majeures soient faites […]. Nous espérons que ce sera le cas d’ici l’automne de 2020 ». Les cours de langues et cultures continueront d’être offerts, mais les étudiant.e.s nouvellement inscrits ne pourront pas suivre une majeure ni déclarer une mineure en une langue moderne donnée jusqu’à ce que le nouveau programme débute sa première année.

Le nouveau programme consistera en un regroupement de programmes de langues modernes qui existent présentement de manière individuelle, dont l’arabe, le mandarin, le japonais, les langues celtiques, l’allemand, l’italien, l’espagnol, le polonais, le russe et le yiddish. Au sein de ce nouveau département, appelé Langues et littératures internationales, il y aura l’option de se spécialiser en une langue et culture spécifique. Donc, au lieu de faire une majeure en espagnol, par exemple, l’étudiant.e aura une majeure en langues modernes, et une spécialité en espagnol. « C’est une majeure dans le cadre de laquelle on peut se concentrer sur une langue, plusieurs langues, ou une voie culturelle plutôt que linguistique », a précisé Esleben.

La raison de ce changement est la faiblesse du taux d’inscription aux programmes de langues et cultures individuels, car « de la perspective de l’administration centrale, les petits programmes ne sont pas efficaces », explique Esleben. En réunissant les programmes de langues individuels, l’Université n’aura qu’à fournir les ressources pour un seul programme à fort taux d’inscription.

Changements au détriment des étudiant.e.s

La réaction de la Faculté des arts, qui abrite le département de langues et littératures, par rapport au nouveau programme a été largement défavorable, selon Luis Abanto, coordonnateur du programme de langue et littérature espagnole. « En tant que professeur, si je répète un peu les réactions de mes collègues, c’est une situation difficile parce qu’on ne peut pas offrir aux étudiants les services qu’ils méritent », explique-t-il.

Abanto se lamente du fait que la structure du nouveau programme ne permette pas aux étudiant.e.s de se spécialiser autant qu’avec le programme actuel : « Le nombre de cours seront réduits de manière très substantielle […]. Avec cette nouvelle structure, les étudiants ne pourront pas autant se spécialiser dans une langue particulière ». D’après Abanto, les cours de littérature et de culture sont également à risque de se faire annuler dans le contexte des changements au programme. Le programme d’espagnol sera l’exception, puisqu’il est le programme de langue et littérature moderne avec le plus haut taux d’inscription. Il conservera donc une certaine autonomie par rapport aux autres langues.

Les programmes de langues et littératures modernes dont il est question ne sont pas forcément semblables, ce qui rendrait leur regroupement problématique. Comme l’a fait remarquer Abanto, « on ne peut pas mettre tout dans un sac. C’est comme s’il y avait très peu d’inscription en biologie, comptabilité et philosophie, et il fallait les mettre tous ensemble. Ça ne marche pas. » 

Abanto tient à préciser que ce ne sont aucunement les membres de la Faculté des arts qui ont voulu rassembler les programmes de langues modernes. La décision aurait plutôt été imposée au Département par la haute direction de l’Université. « C’est sûr que les professeurs ne sont pas contents. Mais qu’on soit content ou pas, ça ne change rien », affirme-t-il. Les professeurs du département croient que ce changement nuira aux programmes de langues modernes et à la formation des étudiant.e.s. En fait, Cristina Perissinotto, coordinatrice du programme de langue et littératures italiennes, a officiellement porté plainte auprès de la haute direction de l’Université en raison de ce changement imposé il y a environ un mois.

De plus, l’annulation de cours pourrait mener à la perte d’emplois de professeurs qui ne sont pas titulaires ainsi que de professeurs à temps partiel.

Avis des étudiant.e.s

En général, ils semble que ces-derniers.ères soient très satisfait.e.s avec les programmes présents. C’est le cas d’Aïcha Ducharme-Leblanc, une étudiante de première année qui entame une mineure en Espagnol : « J’aime beaucoup mes cours d’espagnol. J’aime le programme et je trouve que ça nourrit ma passion pour l’espagnol. Je sens que j’apprends beaucoup ». Camille Richler, étudiante de troisième année ayant suivi des cours en plusieurs langues modernes au cours de son parcours universitaire a qualifié son expérience avec le département de « très positive » et d’« enrichissante ».

Ducharme-Leblanc suggère toutefois un point d’amélioration pour le département : « Ce qui rend l’apprentissage de la langue intéressant c’est la culture. J’aimerais qu’on explore plus la culture. On le fait un peu, mais si on le faisait encore plus ce serait plus intéressant ». Malheureusement, comme l’a souligné Abanto, ce sont les cours de culture et littérature qui sont à risque accru de se faire couper.

Contradiction du mandat

Enfin, Abanto a souligné un point de réflexion important pour l’Université d’Ottawa : « La question est posée à la haute direction : comment la politique et le mandat d’internationalisation se traduisent-ils dans la formation de ses propres étudiants ? Notre département est justement le département qui permet à l’Université de rêver à l’internationalisation ».

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