Par Ghassen Athmni
Effervescence électorale oblige, les nouvelles sportives trouvent de la concurrence dans les médias de masse, d’autant plus que cette échéance fédérale ne semble pas avoir intéressé beaucoup de sportifs célèbres pour qu’ils se joignent à un camp ou à un autre.
En effet, si Wayne Gretzky a fait quelques grands titres sportifs en affichant publiquement son soutien au premier ministre sortant Stephen Harper et au Parti conservateur, l’issue du vote du 19 octobre n’a pas mobilisé d’autres grands noms, et surtout pas de grands noms qui pratiquent actuellement.
Alors qu’un très grand nombre de musiciens, acteurs et autres professionnels du spectacle ont pris des positions on ne peut plus claires, les célébrités sportives ne se bousculent pas pour donner leur avis ou pour exprimer leur préférence.
Ce n’est évidemment pas parce que sport et politique ne sont pas liés.
Les sportifs nord-américains, et peut-être encore plus ceux qui évoluent au Canada, semblent avoir un rapport différent de ce qu’on peut voir dans d’autres parties du monde.
En Europe, en Amérique du Sud et en Afrique, les personnalités du monde du sport s’expriment ouvertement sur la politique et finissent parfois par rejoindre des mouvements, des partis, voire des gouvernements en occupant des postes ministériels.
Bien entendu, il existe aussi en Amérique du Nord des politiciens qui furent un jour des sportifs professionnels de haut niveau, à l’instar de l’ancien maire de Détroit Dave Bing ou de l’ancien député démocrate Heath Shuler, mais très peu ont occupé de hautes fonctions ou ont été chefs de mouvements.
Le sport relève du jeu, de la socialisation, mais aussi de la guerre. Dès l’Antiquité, les épreuves sportives étaient censées préparer les soldats aux combats. Cette tradition a perduré jusqu’au XIXe siècle.
Le militaire est séparé du civil et donc du social; c’est un corps à part régi par des règles différentes et dont l’approche est spécifique. Peut-être est-ce dû au fait que les sportifs nord-américains sont identifiés plus comme des soldats que comme des civils.
On met l’accent sur le combat, la discipline, l’abnégation. L’organisation des sports collectifs nord-américains n’est pas sans évoquer une dimension guerrière. Il est aussi intéressant de remarquer que des sports individuels très populaires dans d’autres parties du monde, comme le tennis et le cyclisme, n’ont pas réussi à devenir des divertissements de grande envergure en Amérique du Nord où spectacle sous-entend presque nécessairement sport d’équipe.
Ne serait-ce qu’au niveau de l’équipement, les trois sports les plus populaires au Canada, le hockey, le football et le baseball, exigent toutes sortes de protections et de casques.
Les camps d’entrainement revêtent une grande importance, ainsi que le nombre d’années d’expérience. Les éléments les plus expérimentés sont désignés par le terme « vétérans », même au niveau universitaire.
Contrairement à leurs collègues du reste du monde, les sportifs nord-américains vont souvent arborer leurs uniformes en dehors de la pratique sportive, que ce soit à des rendez-vous médiatiques ou pour mener des actions caritatives. Rien de mieux qu’un uniforme pour signifier son appartenance à un corps ou à un ordre particulier.
De toutes ces similarités entre l’ordre sportif professionnel et l’ordre militaire découle un certain enrégimentement qui, comme pour les vrais militaires, semble créer une sorte de distance entre un corps particulier, celui des sportifs, et le reste de la société qui fait peut-être que les athlètes de cette partie du monde sont plus rares à s’engager en politique.