Crédit visuel : Andrey Gosse – Directeur Artistique
Par Clémence Roy-Darisse – Cheffe de la section Arts et culture
« Heal the people, heal the land » ; lis-je les yeux rivés sur la page de protestation du clan Unis’tot’en, de la nation Wet’suwet’en. Enrobée de mes privilèges, je me sens impostrice d’écrire un article sur la question.
Le pipeline Coastal GasLink s’étend sur 670 kilomètres. Celui-ci a de fortes chances de s’écouler dans les rivières, de polluer l’air par la transmission de méthane et de détruire d’importants paysages sur son passage. Il passe, entre autres, directement dans les montagnes de Dawson Creek à Kitimat.
Apprenant que le pipeline qui doit traverser leur territoire s’élève à six milliards de dollars et qu’il fait partie intégrante d’un projet de 40 milliards ; je me sens impuissante. Jusqu’où irons-nous pour de telles gratifications ?
Envahie d’articles variés sur la question, je cherche à comprendre d’abord le contexte des blocages.
Un peu d’infos
La nation Wet’suwet’en est l’une des 198 nations autochtones distinctes de la Colombie-Britannique. Elle occupe un territoire traditionnel non cédé de 22 000 kilomètres, au centre de la province. Cette dernière est composée de cinq clans qui occupent chacun une partie du territoire et elles en ont le « plein pouvoir et contrôle ».
Les cinq clans, dont un particulièrement, le clan Unis’tot’en, résistent contre les pipelines depuis des années.
En 1997, la Cour suprême établit le test afin de déterminer l’existence d’un titre ancestral. En 2014, la Cour Suprême reconnait à la nation Tsilhqot’in les première reconnaissance de titre de terre ancestrale.
Aujourd’hui, les chef.fe.s héréditaires revendiquent l’autorité légitime sur leur propre territoire suite à ce jugement. Selon un article du journal Le Devoir, l’anthropologue Antonia Mills affirme que « la Cour suprême a dit que les Wet’suwet’en et les Gitxsan détiennent les droits sur leur territoire ». Mais le jugement de 1997 précise aussi que le territoire peut être utilisé à des fins de développement économique pour la Colombie Britannique.
Les chef.fe.s héréditaires, eux, évoquent qu’ils ont établi un système de droit précédent celui des conseils de bande. Ces conseils ont approuvé le projet. Selon eux, la décision leur revient. Il y a quelques jours, les ministres et les chef.f.e.s héréditaires en sont arrivés à une entente de principe.
Plusieurs revendications me sautent donc aux yeux. D’abord, celle contre la répression policière contrée par davantage de blocages. Puis, celle des chef.fe.s héréditaires qui réclament leur pouvoir juridique, sur le territoire supérieur, aux chef.fe.s des conseils de bande qui ont approuvé le projet.
La répression policière et l’intervention de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) est forte . Tel que publié dans The Guardian, la GRC a affirmé être « prête à faire usage de toute la violence nécessaire ».
Relier les combats
De ces constats troublants, je réalise rapidement que mon inconfort ne fera pas le poids. Mon inconfort face à mon impuissance, puis face à l’injustice environnementale, sociale et politique qui découle de cette situation.
Ce sentiment ne penchera pas assez dans la balance et parfois je me demande si, un jour, collectivement, il le fera.
La seule chose qui me rassure est de penser que notre inconfort face aux changements, face à ceux que nous redoutons, par amour de la stabilité, la routine et l’inertie, ne fera plus le poids un jour non plus.
Guérir la Terre
Je me dis que, ce jour-là, nous serons capable, collectivement, d’espérer plus, de mettre de côté le désintérêt des petits sacrifices personnels. Ce combat, la nation Wet’suwet’en le fait courageusement présentement.
Puis-je transformer ma peur en quelque chose de prolifique ? Je me dis qu’être une alliée de la nation Wet’suwet’en est possible.
Si ce soir, un café à la main, la paralysie me prend pour savoir quoi vous écrire sur cette histoire, je ne peux m’imaginer ne serait-ce qu’un peu la peur ressentie par ces femmes et ces hommes campant pour la survie de leur territoire et surtout pour la survie de notre terre.
La page suivante me guide amplement sur les différents moyens de s’impliquer, j’espère qu’elle vous guidera aussi : http://unistoten.camp/support-us/.