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Régimes : pourquoi ils sont inefficaces, dangereux et stigmatisants

Crédit visuel : Nisrine Nail – Directrice artistique

Chronique rédigée par Camille Cottais – Cheffe du pupitre Actualités

La culture du régime est omniprésente, que ce soit dans les discussions, les revues, les publicités, ou dans la société en général. Elle pousse tout le monde, mais particulièrement les femmes, à haïr leurs corps et à considérer la minceur comme la solution à tout. Cette chronique est un appel à résister aux injonctions de la culture du régime, et notamment à arrêter les régimes qui ne font qu’entretenir la grossophobie et les troubles alimentaires.

La minceur n’a pas toujours été valorisée socialement. Dans les pays occidentaux, le diktat de la minceur est relativement récent : il s’est particulièrement développé après la Seconde Guerre mondiale. Dans d’autres pays où la nourriture est moins abondante, la grosseur est valorisée car est synonyme de richesse et de santé. Les normes de beauté changent donc selon les époques et les cultures, prouvant qu’il s’agit de normes sociales totalement arbitraires.

Les régimes ne fonctionnent pas 

95 à 98 % des régimes échouent à long terme. Les régimes restrictifs sont intenables sur la durée. Certes, ils peuvent provoquer une perte de poids rapide au début, mais ils mèneront dans l’écrasante majorité des cas à reprendre les kilos perdus, voire davantage que le poids initial. On peut donc affirmer que les régimes sont la première cause de prise de poids.

Restreindre caloriquement son alimentation ou éliminer des aliments dont notre corps a besoin ou que nous apprécions ne provoque que manques et frustrations. La restriction place notre corps dans un état d’alerte, et ainsi emmagasinera-t-il autant que possible pour se préparer à une prochaine phase restrictive. Il n’y a pas de différence pour le corps entre un régime et un état de famine.

En raison de cette inefficacité avérée, beaucoup de personnes au régime enchaînent ces derniers toute leur vie, perdant puis reprenant du poids de façon cyclique. C’est le fameux « effet yo-yo ». Ces fluctuations de poids sont dangereuses pour notre corps, affectant par exemple notre système immunitaire.

Les régimes sont dangereux

Les régimes prétendent être bons pour la santé, l’humeur, la peau, et même détenir la clé du bonheur. Pourtant, la restriction calorique nuit fortement à la santé, le corps n’ayant plus assez d’énergie ou les éléments nutritifs nécessaires pour bien fonctionner. Beaucoup de régimes populaires proposent par exemple d’éliminer ou de restreindre drastiquement les féculents, les sucres ou encore les graisses, tous trois essentiels au corps.

Les conséquences physiques de la restriction calorique sont nombreuses : perte de la masse osseuse, rétention d’eau, ralentissement du métabolisme de base, fonte des muscles, troubles digestifs, perte d’énergie et de force, troubles cardio-vasculaires, perturbations endocriniennes… Quant aux conséquences mentales, elles peuvent être dramatiques : perte d’estime de soi, difficultés de concentration, irritabilité, anxiété, isolement, dépression, et surtout développement de troubles du comportement alimentaire (TCA) comme l’hyperphagie boulimique ou l’anorexie mentale.

Si les régimes ne sont pas la cause unique des TCA, ils en sont souvent le facteur déclencheur. Les régimes poussent en effet à développer une relation haineuse avec la nourriture et avec notre corps. La culture du régime normalise par exemple le fait de se punir d’avoir « trop » mangé en faisant de l’activité physique ou en sautant le prochain repas ou encore de ne pas s’autoriser à manger au-delà d’un certain nombre de calories. Elle incite également à féliciter mécaniquement les pertes de poids, peu importe leur cause, et à donner une valeur morale à la nourriture en la labellisant comme « bonne » ou « mauvaise ».

La culture du régime : une industrie multimilliardaire

Pourquoi alors les régimes sont-ils autant promus dans notre société ? C’est bien sûr car des industries bénéficient économiquement de nos insécurités. Crèmes anticellulites ou amaigrissantes, pilules coupe-faim, livres de recettes minceur, chirurgies de l’obésité, « fat camps »… : aux États-Unis, on estime que la culture du régime rapporte 72 milliards de dollars par an. Si cette industrie est aussi fructueuse, c’est précisément parce que les produits qu’elle vend ne fonctionnent pas.

Les échecs de la culture du régime et de ses nombreux produits ne poussent cependant pas à leur remise en question, puisque c’est le.la consommateur.ice qui est blâmé.e. Nous perdons donc de l’argent, du temps et de l’énergie à s’investir dans des régimes qui ne fonctionnent pas afin d’atteindre un idéal de beauté construit socialement.

L’exemple de la cellulite est parlant. Le terme a été inventé en 1958 par le magazine Vogue, puis repris par de nombreuses compagnies afin de créer une insécurité chez les femmes pour s’enrichir. La cellulite est parfaitement normale : elle a toujours existé et est présente chez 80 à 90 % de femmes. Il s’agit d’un complexe inventé de toutes pièces par le patriarcat et la culture du régime afin de vendre des crèmes très onéreuses et tout à fait inefficaces pour la faire disparaitre.

La stigmatisation des personnes grosses

La grossophobie, au même titre que le sexisme, le racisme, l’homophobie ou encore la transphobie, est un système d’oppression qui marginalise et discrimine les personnes grosses. La grossophobie est une conséquence directe de la culture du régime, qui fait croire que minceur (voire maigreur) équivaudrait à santé et bonheur, et ainsi que les personnes grosses seraient nécessairement en mauvaise santé et malheureuses.

Affirmer que la santé et le poids sont des choix de l’individu s’inscrit dans l’idéologie néolibérale de nos sociétés. On y prétend que la grosseur serait provoquée par de la paresse (trop de nourriture et pas assez de sport) et qu’être gros.se serait un échec personnel.

Cela s’accompagne également de la fausse idée que perdre du poids serait facile, et donc qu’il serait légitime de se moquer et de mépriser les personnes grosses. Celles-ci sont jugées pour tout ce qu’elles font, et font face à de nombreuses discriminations, notamment à l’emploi, pour s’habiller et par le personnel médical.

Il faut de toute urgence arrêter de présenter le poids comme un choix ou une question de contrôle de soi. Les facteurs génétiques et socio-économiques déterminent en grande partie notre poids, et nous n’avons que très peu d’impacts sur celui-ci.

Faire confiance à son corps

En nous poussant à ne plus écouter notre faim et nos sensations, les régimes détruisent la relation intuitive que nous avons naturellement avec la nourriture. Les calories, par exemple, sont des unités d’énergie, qui ne signifient rien sur la valeur nutritionnelle d’un aliment.

Une solution pour se départir de la culture du régime et accepter son corps serait d’adopter une alimentation intuitive, afin de se nourrir selon nos besoins mais aussi nos envies. Il faut faire confiance à son corps, qui, s’il n’est pas perverti par la culture du régime ou des troubles alimentaires, sait de quoi il a besoin.

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