Recours collectif d’anciens Gee-Gees contre l’U d’O : Creppin veut mobiliser d’autres hockeyeurs impliqués
– Par Alex Jürgen Thumm et Gabrielle Dubois –
Plusieurs membres de l’équipe de hockey des Gee-Gees de l’Université d’Ottawa (U d’O) intentent un recours collectif de six millions de dollars contre l’institution et le recteur Allan Rock après avoir été injustement associés aux accusations d’agression sexuelle impliquant deux joueurs de l’équipe.
Recours collectif contre l’U d’O
« C’est inadmissible que l’U d’O ternisse la réputation de tous les membres de l’équipe », atteste Me Lawrence Greenspon, l’avocat chargé du recours collectif. Plusieurs joueurs affirment avoir été harcelés suite à la suspension de l’équipe.
Dévoilé dans une conférence de presse, mardi dernier, le recours collectif réclame quatre millions de dollars pour négligence et faute dans l’exercice d’une charge publique et deux millions de dollars en dommages punitifs. Me Greenspon reconnaît que le nombre de cas en souffrance dans les tribunaux pourra prolonger la durée du recours collectif pendant plusieurs années, jusqu’à sept ans, selon plusieurs experts.
Andrew Creppin, membre de l’équipe de hockey et représentant des demandeurs du recours collectif, explique que les mesures prises par l’U d’O ont mis sa réputation et son avenir en jeu. « Les gens sautent à la conclusion que tu le caches, que tu es violeur, et fais partie de toute cette culture », a-t-il ajouté.
Pas tous les joueurs n’étaient contactés d’avance pour se joindre à la poursuite. Alex Touchette et Nicolas Marcoux, deux joueurs de l’année dernière, ont confirmé à La Rotonde qu’ils ne savaient rien du recours collectif jusqu’à ce que celui-ci soit paru dans les nouvelles.
Les deux n’ont pas décidé de leur participation à la poursuite. « Il faut que j’y pense, honnêtement je n’en savais rien avant hier », a affirmé M. Touchette, qui d’ailleurs n’était pas prêt à constater qu’un recours contre l’Université soit complètement bien fondé et légitime. M. Marcoux s’est dit intéressé à s’impliquer.
Environ la moitié des anciens membres de l’équipe de hockey ferait déjà partie du recours collectif et Me Greenspon cherche à inscrire les autres. Seuls les deux joueurs accusés sont exclus, David Foucher, l’ancien capitaine de l’équipe de hockey suspendue, et Guillaume Donovan, l’ancien assistant-capitaine. Leur procès à Thunder Bay est en cours depuis l’été et reprendra le 10 février prochain.
L ‘équipe suspendue pour 2015-2016
L’équipe masculine de hockey sera encore suspendue pour la saison 2015-2016, a annoncé l’Université, vendredi dernier. Les nouvelles mesures qu’elle avait promises pour la saison actuelle n’ont pas été mises en place. « Même si certaines pratiques et procédures ont été revues, nous considérons essentiel d’attendre le dépôt du rapport du Groupe de travail sur le respect et l’égalité, prévu incessamment. Nous aurons aussi à embaucher un nouvel entraîneur pour l’équipe », a déclaré le recteur, Allan Rock. « Dans les circonstances, il s’agit de la décision la plus appropriée ».
Pour Anne-Marie Roy, présidente de la Fédération étudiante de l’Université d’Ottawa (FÉUO), le fait que les joueurs poursuivent l’Université est « décevant ». Elle aurait préféré qu’une résolution extrajudiciaire soit atteinte. Elle maintient, au nom de la FÉUO, que c’était nécessaire de suspendre le programme de hockey. Maintenant, « il faut une stratégie proactive pour prévenir la violence ».
Les recommandations de la chancelière ignorées
La chancelière de l’U d’O et l’ancienne gouverneure générale du Canada, Michaëlle Jean, a écrit un long courriel au recteur Allan Rock, le 24 août dernier, un de plusieurs documents obtenus par le Globe and Mail par le biais d’une demande d’accès à l’information. Écrit principalement en anglais, le courriel reconnaît « la culpabilité par association » ressentie par les joueurs non accusés et qu’« il s’agit certainement d’un grand fardeau pour une jeune personne ».
« Les problèmes sociaux ne se résoudront pas simplement avec une punition. Plus est nécessaire », a affirmé Michaëlle Jean.
Elle continue en faveur d’une « conversation » au sujet de l’incident et de la culture sportive avec l’entièreté de l’équipe. « L’instinct de protection peut donner lieu à des choses formidables comme équipe, mais peut aussi provoquer le silence. Dans un esprit jeune, ce peut être très conflictuel ».
« Je pense qu’il y a un grand besoin de counseling pour aider les Gee-Gees à se regrouper et à passer à autre chose en équipe. Ils ont besoin d’outils pour cette expérience traumatisante », a écrit la chancelière au recteur de l’U d’O.
Le Globe and Mail a découvert que l’Université a reçu environ 150 courriels de parents et d’anciens étudiants suite aux allégations d’agression sexuelle ; certains félicitaient les actions de l’Université, d’autres les ont critiquées.
Deux membres de l’équipe ont été accusés d’avoir agressé sexuellement une étudiante de l’Université Lakehead lors d’un voyage à Thunder Bay, le 2 février 2014. À la suite de l’incident, l’U d’O a congédié l’entraineur et a suspendu son équipe masculine de hockey pour la fin de la saison 2013-2014. La suspension a été prolongée pour la saison de 2014-2015, non seulement à cause de l’enquête policière, mais aussi afin d’embaucher un nouvel entraineur et de rebâtir l’équipe.