– Par Didier Pilon –
On n’écoute pas Pony Girl ; on plonge collectivement dans les torrents éthérés de ses progressions. Enrobé de tous côtés dans un paysage sonore, on se laisse emporter par les métaphores et les mélismes. La précision des musiciens estompe les bris et les transitions. Flou dionysiaque.
Au cours de la dernière année, Pony Girl s’est produit partout à Ottawa. En plus d’une longue liste de festivals (Jazzfest, Folkfest, Westfest, Festival Arboritum, Festival Fringe, WuFest), il a tourné du sud de l’Ontario jusqu’aux Maritimes. Dans un concert spécial à Nature nocturne, les membres du groupe ont présenté leur adaptation de la musique du jeu culte, Chrono Trigger. Quoiqu’en ermitage temporaire afin de finir leur deuxième album, la formation jouera un spectacle au Blacksheep avec Pandaléon le 5 juin ainsi qu’un autre le 12 juillet au Bluesfest.
À ses tout débuts, Pony Girl était une alliance entre Pascal Huot et Julien Dussault qui cherchait à explorer la musique électronique minimaliste. Rapidement, le projet a suscité l’intérêt de bien des gens de la communauté artistique et a fait boule de neige. Au duo de guitares sur échantillonneur se sont ajouté Greggory Clark à la basse, Jeff Kingsbury aux percussions, Isaac Vallentin à la guitare, Yolande Laroche à la clarinette, Mitch Cousineau au piano, à l’orgue et au clavier et Cameron Hill au saxophone ténor. De surcroît, deux autres musiciens se joignent parfois au groupe sur scène – Michael Powell aux percussions auxiliaires et Yuri Bakker au synthétiseur – et près d’une douzaine d’autres ont participé à leur premier album, Show Me Your Fears.
Tout s’enchaînait si rapidement que cet album n’a pris que deux mois à produire. L’album s’est voulu une fenêtre sur un moment d’effloraison artistique. Sans vraiment s’interroger sur la forme de son qu’ils créaient, les membres ont chacun contribué à leur manière. Il en résulte un art rock ambiant acoustique– électrique à plusieurs voix. Un croisement entre la distorsion folk rock de Jeff Buckley et l’ambiance classico-minimaliste de Sigur Rós. L’obscurité épaisse des échantillons électros est percée par de claires mélodies de piano ou de flûte traversière, et accompagnée de riffs acoustiques chaleureux. La batterie est précise et inventive, autant dans les sons qu’elle accentue que par ses omis- sions et ses moments de silence. Alors que termine l’album sur une harmonie à une dizaine de voix, on ne peut s’empêcher de se fermer les yeux et de vivre le moment.
Deux ans après l’album, Pascal Huot souhaiterait maintenant réexplorer les origines plus modestes de la formation. « Avec un peu de recul, je remarque de plus en plus qu’à sa forme la plus pure, c’est vraiment de la musique folk que produit Pony Girl », constate le frontman. « À la base, c’est de la musique qu’on fait avec une ou deux guitares et nos voix ». Le deuxième album, maintenant en production, revisite les chansons plus minimalistes qu’il avait écrites avec Julien Dussault il y a déjà plusieurs années, question de voir si elles résonnent encore. Plutôt que de miroiter l’album sur scène avec une dizaine de musiciens, la formation veut adapter ses créations à divers formats qui accommodent autant trois que douze musiciens.