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Par Yasmine Mehdi – cheffe Actualités
Affirmer que les derniers jours ont été marqués par le tumulte du côté des États-Unis serait un grossier euphémisme. Avec l’adoption de son fameux décret le 27 janvier dernier, le président Trump a suscité des réactions aux quatre coins du monde, y compris sur le campus de l’Université d’Ottawa. Ainsi, entre condamnations du recteur, mot-clic #WelcomeToCanada et mise en place d’une série de mesures d’assistance aux étudiants américains touchés par le fameux décret, l’institution universitaire ottavienne a dénoncé deux fois plutôt qu’une la politique de l’administration américaine. Pendant ce temps, sans que personne ne s’en rende vraiment compte, des publicités de l’Université d’Ottawa étaient affichées sur le site web Breitbart, associé à la alt-right, jusqu’au 30 janvier dernier. Qu’en est-il?
Qu’est-ce que Breitbart News?
Média numérique ultra-conservateur fondé en 2007, Breitbart s’est récemment fait connaitre du grand public grâce à son président sortant, Stephen Bennon, aujourd’hui conseiller du président Trump et membre du Conseil de la sécurité nationale.
Il y a quelques mois, Bennon lui-même affirmait de Breitbart qu’il s’agissait d’une « plateforme pour la alt-right », un terme souvent associé au suprémacisme blanc, au fascisme et au néonazisme. Il n’est donc pas rare que des articles adoptant des thèses ouvertement racistes, xénophobes, homophobes ou sexistes soient publiés sur le site web.
Sleeping Giants, combattre Breitbart à la source
« Nous essayons d’arrêter les sites web racistes en arrêtant leurs revenus publicitaires », peut-on lire sur le page Twitter de Sleeping Giants, une initiative citoyenne ayant débuté en novembre dernier, suite à l’élection présidentielle américaine.
Sleeping Giants invite les internautes à publier des captures d’écran de Breitbart.com afin de constater quelles publicités s’y trouvent. Des annonceurs tels que Uber, Sephora, YouTube et Air Canada ont été ciblés par l’organisation, qui se targue d’avoir réussi à convaincre plus de 800 entreprises de retirer leurs publicités du site web controversé.
« Les compagnies ne diffusent pas directement leur publicité sur Breitbart, mais utilisent des cookies pour suivre les internautes alors qu’ils naviguent sur plusieurs sites. C’est ce qu’on appelle le retargeting. Ainsi, si une organisation veut s’assurer de ne pas être sur certains sites, elle doit les ajouter à une liste d’exclusion », a expliqué un organisateur anonyme de Sleeping Giants. Selon la même source, la vaste majorité des annonceurs ne seraient donc pas au courant de la présence de leurs publicités sur Breitbart.
L’Université d’Ottawa, pas une exception
Des dizaines d’universités figurent sur la liste des organisations ayant retiré leurs publicités de Breitbart : Zurich, Phoenix, Chicago, Minnesota, mais aussi McGill, Montréal, Laval et de la Colombie-Britannique, pour n’en nommer que quelques-unes.
On notera cependant que l’Université d’Ottawa ne fait pas partie des organisations citées dans la liste mise à jour pour la dernière fois le 29 janvier dernier. Le 30 janvier dernier cependant, Isabelle M.-Pulkinghorn, gestionnaire aux relations médias, expliquait à La Rotonde : « L’Université d’Ottawa a pris les mesures nécessaires afin de s’assurer que ses annonces publicitaires ne paraissent plus sur des sites comme Breitbart News ou d’autres sites qui ne respectent pas ses valeurs. »
Cette mesure survient alors que quelques internautes exhortaient l’Université à retirer ses publicités via Twitter. « @uOttawa Saviez-vous que votre publicité soutient le site de propagande raciste d’extrême droite Breitbart? », peut-on notamment lire dans un gazouillis du 28 janvier.
Si l’Université d’Ottawa, de même que Carleton, semble avoir pris les mesures nécessaires afin de retirer leurs publicités de Breitbart, la lutte est loin d’être terminée pour Sleeping Giants : « Aujourd’hui, l’objectif principal de notre campagne est de rendre les annonceurs conscients de ce que leurs publicités financent et de leur donner une chance d’agir. »