Crédit PHOTOS : EMILIE AZEVEDO
Par: Nonibeau Gagnon-Thibeault
L’artiste franco-ontarienne Mique Michelle expose au Studio Sixty Six une série de photographies prises dans des écoles abandonnées au nord de l’Ontario qu’elle a marqué de ses graffitis. À la fois désolantes et empreintes d’espoir, ses photographies sont un appel à l’action pour redonner de la dignité à ces communautés.
Mique Michelle a elle-même grandi dans une de ces écoles maintenant abandonnées. Lorsqu’elle est entrée dans l’édifice délabré pour la première fois avec une amie, elle a été surprise de constater que l’endroit était rempli d’objets, dont des livres d’écoles.
En explorant le bâtiment inoccupé, elle avait remarqué que tout avait été laissé tel quel. Les microscopes, les livres et le matériel scolaire divers y traînaient. Même une tasse avec du café congelé était toujours sur un bureau. « On se croyait comme à Tchernobyl, mais on était dans le nord de l’Ontario, dans un endroit accessible », partage Michelle.
Ceci a inspiré l’artiste à photographier d’autres écoles délaissées dans le nord de l’Ontario. Sur une période de trois ans, elle a marqué de ses graffitis et documenté par la photographie le phénomène du délabrement des 14 écoles fréquentées entre autres par des communautés autochtones. « Ça ne devrait pas être de même. On devrait avoir une responsabilité d’utiliser ces ressources achetées avec des fonds public », se désole Michelle. Elle déplore le fait que toutes ces ressources pourraient aller à d’autres écoles en difficultés financières.
Le graffiti pour donner de la vie
Mique Michelle utilise le graffiti pour extérioriser ses réactions à l’état de ces écoles en ruines. De son style unique, elle peint les murs, y laisse des mots, puis les prend en photo. Le contraste entre graffitis colorés et tons ternes et sombres des locaux remplis de matériaux scolaires est évident sur les clichés.
L’artiste franco-ontarienne voit ses graffitis comme un symbole d’un espoir manquant à l’intérieur de ces bâtiments. Elle-même conserve de précieux souvenirs dans son école. « Une des salles, c’est là que je passais Noël avec ma grand-mère. Quand on l’a vue vide comme ça, avec de la vaisselle cassée par terre, on s’est dit que ça devrait être rempli de couleurs, de vie. On a essayé d’ajouter ce qui devrait y être », explique-t-elle.
Un appel à l’action
Ses photographies documentent aussi le désespoir visible dans l’école en détérioration. « Quelqu’un est venu et a écrit « this sucks » sur un mur. Ceux qui passent ont le cœur brisé », raconte Michelle. Voir les jeunes de ces communautés se déplacer sur de longues distances afin d’avoir accès à une éducation la révolte. « Ils perdent leur culture. Ça fait du dommage ! On est capable d’éviter ça », insiste l’artiste, visiblement émue.
Michelle espère que son œuvre illustrera qu’il est temps de passer à l’action pour immédiatement redorer l’environnement de ces communautés autochtones, notamment en appliquant les recommandations de la Commission de vérité et réconciliation. « Ce ne sont pas des suggestions, il faut le faire ! », souligne-t-elle.
L’exposition Acts of Abandonment au Studio Sixty Six se poursuivra jusqu’au 10 octobre.