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La fermeture des bibliothèques, une procédure «maladroite»

20 janvier 2014

– Par Sara Ghalia –

La fermeture de plusieurs bibliothèques scientifiques de Pêches et Océans Canada fait débat chez les scientifiques. Le gouvernement Harper est accusé de détruire un héritage culturel important. Depuis avril 2013, date à laquelle le gouvernement fédéral a officiellement annoncé la fermeture de sept des onze bibliothèques de Pêches et Océans Canada, plusieurs questions se posent sur les raisons de cette décision et sur la manière dont elle est mise en pratique.

Coupures financières et tensions

La fermeture des bibliothèques fait partie des maintes coupures budgétaires décidées par le gouvernement Harper pour diminuer le déficit. Cela sauverait à peu près 443 000 dollars pour l’année 2014-2015, sur un total de 80 millions de dollars d’économies, résultat des autres coupures faites au ministère Pêches et Océans Canada.

Kelden Formosa, président du club Conservateurs uOttawa ajoute que « la grande majorité des personnes qui utilisaient les bibliothèques, c’est les employés du département [de Pêches et Océans Canada]. Il y avait typiquement à peu près 12 personnes hors du département qui les utilisaient sur une base annuelle ». Il explique que les employés ont été consultés au sujet des livres, et que l’accès à ces livres allait être assuré via une base de données virtuelle.

« Est-ce qu’on a besoin de ces bibliothèques-là ? », observe Patrick Fafard, professeur agrégé à l’École supérieure d’affaires publiques et internationales et spécialiste en politique canadienne et en science et santé (entre autres). Il précise que des versions en ligne des livres seraient plus faciles d’accès et que l’entretien serait aussi plus économique.

« Au niveau procédural, le gouvernement se trouve mal pris », ajoute tout de même M. Fafard. Il estime que la procédure a été « maladroite », mais que ce n’est pas « scandaleux ».

M. Fafard reconnait toutefois que le gouvernement s’intéresse beaucoup moins à mettre le Canada sur la scène de la recherche internationale, surtout en matière d’environnement.

D’ailleurs, plusieurs scientifiques qui se sont entretenus avec divers médias ont fortement critiqué la décision du gouvernement. L’un d’entre eux a déclaré au the Tyee : « Tout ce capital intellectuel est maintenant parti. C’est comme un autodafé. C’est la destruction de notre héritage culturel. » D’après M. Fafard, cette tension entre la communauté scientifique et le gouvernement fédéral s’explique de plusieurs façons, et n’est pas seulement reliée à la fermeture des bibliothèques. Il explique que « depuis trois ou quatre ans, on a un phénomène où la communauté scientifique, surtout ceux qui s’intéressent à l’environnement, font une critique de fond du gouvernement canadien. » Les coupures financières au niveau de la recherche et des postes (exemple de la Région des lacs expérimentaux en 2012, avec l’arrêt du financement fédéral), la limitation du droit de parole scientifique et etc. amplifient la question. Néanmoins, M. Fafard estime qu’il est « peut-être prématuré » de conclure que le gouvernement « déteste la science ».

Des techniques typiquement conservatrices?

Kelden Formosa explique que bien que ces coupures peuvent être idéologiquement controversées, « nous avons une différente perspective sur les questions environnementales, nous voulons faire des choses concrètes. […] Nous voyons quelles sont les responsabilités constitutionnelles du gouvernement. » Il ajoute qu’il n’est pas toujours nécessaire que le gouvernement soit impliqué et qu’il est parfois meilleur pour des institutions privées qui se concentrent sur l’environnement de s’en occuper. Est-ce une manière typiquement « conservatrice » de penser?

Sur cette question, M. Fafard précise qu’il n’y a pas de lien direct entre l’idéologie conservatrice et la fermeture des bibliothèques. Il s’agit surtout d’une réduction de la fonction publique, chose sur laquelle le gouvernement Harper a beaucoup insisté ces dernières années.

D’ailleurs, les coupures au département Pêches et Océans Canada auront supprimé plus de 3o postes, notamment les patrouilles de surveillance des activités de pêche à Terre-Neuve, plusieurs programmes liés à la recherche sur la pollution industrielle de l’eau (Région des lacs expérimentaux), l’étude des impacts biologiques des contaminants, pesticides et l’industrie du gaz et du pétrole. Néanmoins, d’après les données publiées en juin 2013 par le bureau du directeur parlementaire du budget (DPB), l’agence des services frontaliers du Canada s’est agrandie de plus de 5200 employés, suivie par Service correctionnel Canada qui s’est élargi de 4,516 employés. Pour son suivi des dépenses pour le deuxième trimestre de 2013-2014, le DPB a noté qu’il « n’a pas encore reçu, de la part des ministères et des organismes fédéraux, les données complètes sur les niveaux de service, qui sont nécessaires à l’évaluation de la viabilité financière des compressions prévues dans le budget de 2012. »

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