
Au carrefour du théâtre franco et anglo: Les passants, une histoire de rencontres
Arts et culture
Par Clémence Labasse – directrice artistique
Du 21 février au 12 mars prochain, des acteurs francophones envahiront la scène principale de l’anglophone Great Canadian Theatre, pour la toute première fois de son histoire. Issue d’un projet trans-provincial ambitieux, Les Passants de Luc Moquin est une célébration : la célébration de l’union de deux traditions théâtrales bien différentes mais aussi la célébration de la foule et du quotidien, de cet inconnu si familier que pourtant on ne connait à peine.
À la croisée des langues
En 2012, un projet pancanadien émerge dans la tête de Robert Metcalfe, directeur artistique de la Prairie Theatre Exchange. Il met au défi six compagnies de théâtre à Edmonton, Winnipeg et Ottawa, tantôt francophone et tantôt anglophone, de s’allier dans leur ville respective pour créer trois nouvelles pièces. Le tout juste à temps pour fêter dans les deux langues officielles le 150e anniversaire de la Confédération.
Le Great Canadian Theatre et le Théâtre Catapulte d’Ottawa ont relevé le défi, et de leur union est née la pièce Les Passants. Présentée en français avec des surtitres en anglais, la pièce est hybride, comme partagée entre un réalisme terre-à-terre plus anglophone et un symbolisme propre au théâtre français.
À la croisée des destins
Les Passants, c’est l’histoire, ou sont plutôt les histoires des gens sans-histoires.
Sur scène on voit déambuler dans une vingtaine de vignettes quatre acteurs qui interprètent une trentaine de personnage. La mise en scène est minimaliste, six panneaux en guise de portes, et la lumière pour seul véritable décor. Pourtant, d’une scénette à l’autre, le spectateur est transporté par une variété de technique et de style inouïe, du tragico-comique au film d’espionnage : tout y passe.
L’idée est premièrement venue à l’auteur quand est arrivée la fusillade du 14 novembre 2014 sur la colline du parlement. « Je me suis mis à songer à cet homme qui avait péter les plombs, à comment quelqu’un pouvait en arriver à se sentir aussi profondément aliéné par le monde qui l’entoure. Je pensais aux nombreux visages que je pouvais croiser en une journée, à ces destins parallèles qui se frôlent tous les jours mais qui suivent leur cours hasardeux et compartimenté sans qu’on en connaisse le début ni la fin » explique dans le livret de la pièce, Luc Moquin.
Comme quoi de la tragédie peut parfois naître le chef d’œuvre.