– Par Émilie Deschamps –
Le début de la fin du SIDA: c’était le thème d’une discussion entre quatre panelistes, dont des séropositifs, à l’Agora de l’Université d’Ottawa (U d’O), jeudi 29 novembre dernier. Une quarantaine de personnes étaient présentes à cet évènement organisé par le Service de santé de l’U d’O dans le cadre de la Journée mondiale du SIDA.
Le traitement antirétroviral comme prévention?
Lara Cousins, coordinatrice en santé étudiante au Service de santé de l’U d’O était l’une des organisatrices de la discussion. Selon elle, depuis la Conférence internationale sur le SIDA de juillet dernier, l’idée selon laquelle donner un traitement antirétroviral (ARV) aux séropositifs serait une méthode de prévention, a été mise de l’avant. L’espoir, suscité par cette initiative du Dr Montaner, est de pouvoir en arriver à une génération exempte du VIH en réussissant à éviter complètement la transmission.
«Les médias ont repris l’idée du traitement, en tant que méthode de prévention, comme un slogan. C’est bien, c’est optimiste, mais j’étais un peu sceptique et je voulais voir, selon les intervenants, si c’était vraiment possible», explique Lara Cousins.
Vivre avec les effets secondaires
À l’enthousiasme suscité par le Dr Montaner et son équipe, les quatre panelistes ont apporté plusieurs bémols. Claudia Medina est coordinatrice du programme des prison pour femmes chez PASAN, un organisme qui travaille avec les prisonniers atteints par le VIH/SIDA. Selon elle, il ne faut pas oublier que le traitement a des effets secondaires assez importants et donc, qu’il ne convient pas nécessairement à tout le monde.
Dans son cas, Claudia a fait face à la dépression, après avoir découvert qu’elle était séropositive, et les effets secondaires des médicaments antirétroviraux ont aggravé sa dépression. De plus, en tant que mère monoparentale, elle trouvait trop difficile de s’occuper de son enfant tout en vivant avec les effets secondaires du traitement. La nausée, les vomissements, la diarrhée, la perte d’appétit, l’insomnie et la fatigue sont quelque-uns des nombreux effets secondaires qui peuvent être engendrés par la prise d’antirétroviraux.
Pas de solution simple pour un problème complexe
Le Dr Paul MacPherson est professeur associé à l’U d’O et spécialiste des maladies chroniques à l’Institut de recherche de l’Hôpital d’Ottawa. Il a expliqué que, selon ses tests, bien que les traitements antirétroviraux rendent la charge virale indétectable dans le sang, dans 6 % des cas, celle-ci peut encore être détectée dans le sperme. «Nous voulons une solution magique, que ce soit aussi simple que prendre une pilule», a expliqué le Dr MacPherson, en ajoutant que la complexité du problème faisait en sorte que la solution ne pouvait être aussi simple.
Vicky Schreiber, qui travaille pour Oxfam en Afrique, a aussi rappelé les différences qui existaient de pays en pays, en ce qui concerne l’accès à la médication et même, à l’information. Même au sein du Canada, entre les provinces, les régimes d’assurance maladie varient beaucoup. Grant Cobb, du Comité du SIDA d’Ottawa, a conclu catégoriquement: «Nous ne voyons pas le traitement comme une prévention à cette table».
« Le sexe, c’est naturel »
Évidemment, l’idée de diminuer la stigmatisation entourant les personnes atteintes par le VIH/SIDA a été au cœur des différentes présentations. À ce sujet, le Dr MacPherson s’est exclamé: «Le sexe est naturel, beaucoup de gens dans cette salle ont eu des relations sexuelles. On n’attrape pas le SIDA en faisant quelque chose de mal ou parce qu’on est une mauvaise personne!»