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Éditorial

« Pour ne plus avoir notre langue dans nos poches »

24 septembre 2018

Éditorial

Par Mathieu Tovar-Poitras – Rédacteur en chef

 

Cette ligne de Notre Place par Paul Demers résonne avec force dans le contexte actuel.  À un moment où des changements politiques ont eu lieu – ou peuvent survenir –, la communauté franco-ontarienne ne doit pas se faire timide.

Avec le gouvernement Ford à Queen’s Park, les dossiers sous la tutelle de la ministre déléguée aux Affaires francophones, Caroline Mulroney, doivent faire l’objet de pression politique. Certes des rencontres entre celle qui est aussi la Procureure Générale de l’Ontario et, par exemple, l’Assemblée Franco-Ontarienne ou le commissaire aux services en français sont des pas vers l’avant. Mais peut-on vraiment qualifier ces rencontres de preuves démontrant une évolution de la situation si ces dernières sont en fait tout à fait normales ? Non.

Au-delà des organisations et des individus dont le mandat est lié au fait français en Ontario, la communauté ne doit pas rester stoïque et se contenter d’être spectatrice devant une pièce les concernant. Ce n’est pas la première fois qu’une telle idée est exprimée. Ce n’est même pas la première fois qu’elle tache d’encre des pages de La Rotonde. Et pourtant nous y voilà encore.

Il y a une fierté entourant l’identité franco-ontarienne. Mais outre les événements organisés à des moments précis, les contestations et les célébrations se font de manière plus diluée. La présence d’organisations représentant les Franco-Ontarien.ne.s est une nécessité fondamentale de notre société. Elle assure une certitude et permet une évolution organisée des dossiers francophones. Pourtant, ces organismes ne doivent pas être perçus comme ayant le monopole des revendications car cela équivaudrait à un carcan condamnant l’ensemble de la communauté franco-ontarienne à l’inertie.

Le public doit retrouver sa nature d’acteur de premier-plan. C’est une vision critique de la chose et pourtant il faut se le dire. Les manifestations de contestation au sein d’une communauté, avec une emphase particulière sur le médium, doivent être davantage exprimées. C’est bien d’avoir des institutions nous représentant, mais il ne faut pas prendre cela comme une raison pour ne devenir qu’un simple passager. Surtout pas maintenant.

Prudence ou apathie ?

Avec des dossiers tels que la taxe du carbone et la taille du conseil municipal de Toronto, les progressistes-conservateurs ont les mains pleines. Il faut donc que des facteurs externes viennent mettre la francophonie dans le giron du gouvernement.

Les différentes publications concernant Mulroney et les dossiers francophones indiquent son ouverture aux enjeux franco-ontariens. Par contre, elles laissent aussi transparaître une certaine prudence chez la ministre déléguée. Sans se prononcer concrètement et faire face à des questions épineuses sur les spécificités des dossiers, on a l’impression que l’on joue avec la rondelle du côté du gouvernement. Mais à un moment donné, il faut commencer à tirer au lieu de jouer par la bande.

Toutefois, la communauté a aussi un rôle à jouer. Elle se doit de maintenir un niveau de pression constant à défaut de voir les enjeux les touchant se voir accorder une impression d’importance qu’au moment d’aller aux urnes. Des dossiers comme celui de l’Université de l’Ontario français doivent être l’objet d’un dynamisme revendicateur et demander des comptes.

Nonobstant les développements touchant le controversé projet de loi 5, l’attention vers les autres projets se fait avare. Sans diminuer l’importance de ce dossier, il ne faut pas que des élus et le public perdent de vue les autres enjeux. C’est donc une phase clé pour la communauté franco-ontarienne de responsabiliser Queen’s Park de manière constante et soutenue.

D’une capitale à l’autre

Si l’on peut en dire beaucoup sur la francophonie en Ontario, on peut en dire autant au sujet de la Ville d’Ottawa. En pleine campagne électorale, la pression sur les enjeux francophones est cruciale. Le contexte actuel est d’autant plus urgent compte tenu de l’absence en l’espèce des enjeux francophones chez les candidats, et même de la francophonie en général chez ces-derniers.

Le projet d’Ottawa ville bilingue n’est mentionné que sous forme de murmure, et malheureusement aucun mouvement de masse et ordonné réclame que l’on monte le ton. Pourquoi est-ce que l’on n’entend pas assez de personnes demander à leurs candidats ce qu’ils s’engagent à faire pour promouvoir la francophonie et le bilinguisme à Ottawa ? Pourquoi est-ce que l’on n’ose pas demander au maire sortant pourquoi il est si timide face aux dossiers liés à la francophonie ?

Parce que c’est quelque chose qu’il ne faut pas oublier, que c’est du haut que les décisions se prennent. C’est au maire de montrer l’exemple. Et pourtant, Jim Watson n’est pas ce leader pour le développement de la francophonie dans la capitale nationale. Satisfait du statu quo qui limite ses risques durant cette campagne. Celui qui a toujours été réticent au bilinguisme officiel de la Ville d’Ottawa ne changera pas du jour au lendemain.

Il faut alors se poser la question à savoir si c’est la surdité du maire qui est aussi développée qu’elle en a l’air ou si ce sont plutôt les appels de la communauté francophone qui ne sont pas assez forts. Il est vrai que l’histoire a prouvé que c’est lorsqu’un groupe est uni derrière une idée, celle-ci se concrétisera. Toutefois, il faut être deux pour danser le tango. On peut le danser même si l’un est peut-être plus timide, mais le tout tombe à l’eau si le second ne veut rien savoir.

Et voici la relation dichotomique entre Watson et la francophonie.

Non seulement il ne veut rien entendre, mais il ne veut pas se prononcer sur le sujet. Et les rares fois où il le fait, c’est avec le même enthousiasme qu’il aurait pour se pointer à une assemblée publique dans le cœur de Vanier.

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