Arts et culture
Par Myriam Bourdeau-Potvin
Théâtre littéraire
C’était devant une salle comble que s’est présenté l’auteur français Éric-Emmanuel Schmitt, en passage au Centre Shenkman lors de sa tournée franco-canadienne. Pour Didier Morissonneau, producteur de la pièce, « la présentation de la pièce Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran, jouée par son auteur le célèbre Éric-Emmanuel Schmitt, est le genre de soirée historique ».
Originalement une pièce de théâtre adaptée au cinéma en 2003, Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran relate l’histoire autobiographique fictive d’un jeune français juif, Moïse (ou Momo, puisque c’est moins impressionnant), qui se lie d’amitié avec monsieur Ibrahim, l’arabe tenancier de l’épicerie sur la rue bleue. Sauf qu’il n’est pas vraiment arabe : il est musulman. Et la rue n’est pas vraiment bleue. Et les apparences sont souvent trompeuses. À travers leur amitié, Schmitt traite non seulement des différences entre les religions, mais aussi du lien d’attachement entre père et fils.
La mise en scène est épurée et simpliste, représentant les trois lieux principaux de l’histoire; la bibliothèque du patriarche dépressif, le petit magasin de Monsieur Ibrahim et une chambre de la rue du Paradis, là où Momo s’achète des filles avec les économies de son cochon couleur vomie.
Bien que Momo soit le personnage principal et narrateur de l’histoire, Schmitt prend tour à tour le rôle du jeune homme, celui de Monsieur Ibrahim, celui du père, celui de la mère, celui du vendeur de voitures ou même celui de Brigitte Bardot. Avec la légèreté de quelqu’un qui connait le métier depuis plusieurs années, il récite sans précipitation les 84 pages de texte qui est le sien. Schmitt livre une performance à la hauteur de son texte, et avoue lui-même que « chaque fois est différente. La preuve, c’est que parfois, comme aujourd’hui, la lune me reste dans les mains! » En effet, en plaisantant que l’histoire se déroule dans les années 60, Schmitt tourne à la blague les minimes difficultés techniques.
Cette pièce a été présentée par la saison artistique du Mouvement d’implication francophone d’Orléans (MIFO), qui a pour mission de promouvoir les activités francophones dans ce quartier de l’est de la Capitale. Le choix était judicieux, puisque Morissonneau note que, malgré que le texte original date un peu, il est toujours aussi actuel : « La fin de semaine dernière, nous avons commémoré le triste anniversaire des attentats du 13 novembre [de l’année dernière] à Paris. Ce soir-là, j’étais avec M. Schmitt qui jouait sur scène ce texte et cette pièce. Nous avons appris après le spectacle toute l’horreur de ce qui se passait à Paris. Et je crois que c’est à ce moment que cette pièce, pourtant écrite en 1999 et déjà très pertinente, est devenue, je crois, absolument essentielle. »