Arts et culture
Par Myriam Bourdeau-Potvin – Cheffe Arts et culture
Le jeudi 23 février dernier se tenait le premier évènement organisé par le Temple Satanique d’Ottawa au House of TARG. À l’horaire étaient prévus quatre groupes dont trois bands locaux regroupés sous l’emblème de la musique métal. La Rotonde en a profité pour tâter le pouls de la culture métal dans la région de la capitale.
Le Temple satanique d’Ottawa
Contrairement à la croyance populaire, le Temple satanique n’est pas un organisme religieux comme son homologue, l’Église de Satan. Nick Theriault, membre actif et porte-parole de la branche ottavienne du Temple satanique, clarifie : « C’est un Satan littéraire, nous ne croyons pas à un démon cornu surnaturel. Nous constatons par contre qu’à travers le temps, il y a toujours eu un avocat de la raison et de la pensée critique, et ce rebelle intérieur va toujours remettre en question : pourquoi faisons-nous ce que nous faisons? Qu’est-ce ce que nous devons faire? Y a-t-il un meilleur moyen de faire? Je pense que le cadre satanique permet l’exploration de ces questions. »
Soirée hétéroclite
Puisant son origine à même la mythique Salem, au Massachusetts, ce n’est que récemment que la communauté s’est installée dans la capitale canadienne. Theriault misait sur la variété dans les genres pour créer un premier évènement rassembleur permettant de se défouler tout en faisant une collecte de fonds : « Une chose [que j’ai constatée] au sein de la communauté métal, et j’en fais partie depuis très longtemps, c’est que tout le monde se soutient entre eux. C’est une scène qui offre très peu de drame, et je crois que c’est en grande partie parce que cette musique apporte tellement de soulagement, qu’elle permet d’évacuer les stupidités qui préoccupent les gens normalement. »
La soirée a débuté avec Wychdoktor, seul sur la scène lourdement embrumée de vapeurs de glycol et éclairée majoritairement par des lasers colorés. Il a désengourdi le public amassé devant lui avec des sons industriels très lourds, dignes d’une trame sonore de film épique. Il troqua ensuite sa console pour la guitare et s’est joint au groupe suivant, Ooluu. La voix nasillarde d’Eric Davindra rappellait vaguement celle d’Ozzy Osborne et ne tarda pas à se transformer en cris stridents. Énergique, le frontman du groupe n’hésitait pas à traverser la limite entre la scène et la foule pour larguer quelques coups de coude dans le but d’initier une violence amicale. C’est ensuite aux musiciens matures d’Opium Winter, également originaires d’Ottawa, de prendre le relai avec leurs airs de bluesman et leur son influencé par l’âge d’or du métal trash. Au final, c’est Hopeless Youth, un groupe de hardcore montréalais, qui est monté sur scène, prêt pour un moshpit qui n’a malheureusement jamais eu lieu.
Une sous-culture prolifique
Pour Stef Jomphe, alias du barbu roux du groupe Insurrection, « le métal, chacun a sa définition, on dirait, mais ça revient vraiment toujours à l’intensité. Peu importe ce qui est joué, ça se doit d’être fait avec intensité : du jazz intense, du blues intense, du classique intense. Rajoute une pincée de distorsion et bedingbedang : métal! » Le groupe originaire de la côte québécoise de la région de la capitale est actif dans le monde du métal depuis 2003 : « On a fait sept Rockfests, deux Trois-Rivières Metalfest et d’autres fests ici et là. Je pense qu’on vit très bien avec ça. Nous, on est concentrés sur ce que l’on fait, donner le meilleur spectacle possible aux fans, nouveaux ou vieux. »
Afin de s’initier au genre, Jomphe propose d’aller faire un tour à « La Kabane [un restaurant métal dans le Vieux-Hull], c’est un bon point de départ […]. On suggère d’aller voir un show avec une tête d’affiche pas trop grosse, mais que vous risquez d’aimer… comme Anonymus mettons, ou même Insurrection, ça va être juste assez convivial, pas trop extrême. L’ambiance va être bonne, ça va être le party! »
Préjugés?
Somme toute, le Temple satanique d’Ottawa aura accumulé pas moins de 550 $ lors de son premier évènement sur base de don. Le tout sera remis à la population sans-abris d’Ottawa, don qui a été difficile à faire accepter selon Theriault : « Ce qui est hors-norme ou différent semble effrayer les gens à nouveau, ce que je ne voyais pas il y a quelques années. » Il suppose que plusieurs organismes auraient refusé ce don par peu d’être associé au terme « Satan ».
À l’inverse, Jomphe se montre plutôt optimiste et dit ne pas avoir subi d’expérience désagréable en lien avec ce type de préjugés. Il ajoute cependant qu’il ne « faut pas déranger les matantes pendant La Voix sur les réseaux sociaux, c’est vraiment horrible ».