OPERA
Catherine Dib | Chef de pupitre
@catherinedib
Brigitte Haentjens renoue avec le théâtre allemand, qu’elle avait déjà confronté auprès de Müller et Buchner, dans la mise en scène de l’Opéra de quat’sous. Engendrée par l’imagination révoltée d’un certain Berthold Brecht, la pièce orbite autour de la lutte de deux hommes d’affaires, un chef de mafia, des mendiants et un criminel s’ajoutant à ce tableau aux relents d’expressionisme. Entretien avec la redoutable metteuse en scène.
Le bal des insoumis
Travail effectué sur une période de trois ans avec 23 acteurs sur scène, ce portrait datant des années 1920, représentant une société sur le bord de la crise de nerfs, a attiré Brigitte Haentdjens pour diverses raisons : « Je crois que c’était logique dans mon cheminement. J’ai beaucoup fréquenté Müller et Buchner, et là, c’était tombé sur Brecht. »
Par ailleurs, la jeunesse présente dans la plume révoltée de Brecht ne pouvait que s’accorder à sa démarche artistique reconnue pour son audace et déviant des chemins battus. « [Ce qui me plaît,] c’est la révolte, la noirceur du regard sur le monde, affirme la metteur en scène. C’est quand même une œuvre de protestation contre les institutions, ça. »
La langue de Brecht traduite dans la langue de Miron
Comportant 21 chansons de Kurt Weill, cet opéra ne sera chanté ni en allemand ni dans la version officielle française. En effet, Mme Haentjens ne s’est pas arrêtée à repenser la mise en scène, mais a poussé la redéfinition de la fameuse pièce en tablant sur une traduction en québécois par son complice Jean-Marc Dalpé, dramaturge franco-ontarien originaire d’Ottawa.
S’y identifier n’en sera que plus foudroyant, la pièce chantant notre société actuelle, non seulement au moyen du parler québécois, mais aussi en reflétant l’atmosphère sociopolitique qui nous entoure. « Je crois que ça fait écho à bien des égards, précise la metteuse en scène. À ceux qui dominent le monde actuellement, le système bancaire, la mondialisation, [entre autres]. »
Ainsi, la réactualisation de la pièce par la transposition du Londres des années 1920 à Montréal 1939, ainsi que par un jargon alterné, lui permet de regagner ses lettres de noblesse en matière de provocation féroce. « C’est important que ça puisse résonner de manière très précise auprès du public », souligne Mme Haentjens. « C’est un spectacle qui parle directement aux gens, Je crois que ça peut toucher directement les gens, le cœur et la tête », conclut-elle.
Où? Au Centre national des arts
Quand? Du 28 février au 3 mars
Les mendiants, les corrompus et les prostitués se côtoient dans un quartier mal famé d’un Montréal oublié de 1939. Jonathan Peachum et MacHeath se livrent une bataille sans fin Le mariage de ce dernier, roi des mendiants, avec Polly, la fille de Peachum, engagera une guerre sans merci entre les deux camps,. Une comédie musicale aux sonorités grinçante, ou la ligne entre la moralité et le crime est absente.