– Par Léa Papineau Robichaud –

Simon Tremblay-Pépin, chercheur à l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS), remet en question la décision du Parti Québécois (PQ) de recruter Pierre-Karl Péladeau.

L’auteur d’Illusion : petit manuel pour une critique des médias était à l’Université du Québec en Outaouais la semaine dernière pour le lancement du numéro 11 des Nouveaux Cahiers du socialisme. Le sujet premier de la conférence devait porter sur la couverture médiatique de la crise étudiante de 2012, mais la discussion a rapidement changé à la campagne électorale québécoise qui est en cours.

M. Tremblay-Pépin critique ouvertement cette nomination du propriétaire de Québecor au sein du PQ, soulignant notamment la fiducie. Cette idée veut que M. Péladeau cède ses avoirs afin de ne plus être pris dans l’instance décisionnelle de son entreprise. Ainsi, il ne pourra pas avantager le gouvernement. « Le monsieur continue à recevoir de l’argent parce qu’il possède des journaux. Il possède certains journaux dont il connait très bien le réseau de distribution et le fonctionnement. Il est né avec ça dans les mains. Malgré tout, on s’inquiète seulement qu’il s’en serve pour favoriser le gouvernement. Et s’il se servait du gouvernement pour favoriser ses journaux? En quoi une fiducie l’empêcherait de faire ça? », reproche le chercheur à l’IRIS et blogueur au Journal de Montréal.

Celui qui s’y connaît bien en journalisme, ayant étudié dans ce domaine au collège La Cité, a aussi tenu à rappeler que le PQ rencontrerait peut-être quelques difficultés à s’assurer que PKP se pliera à la plateforme du parti. « Gérer un magnat de la presse sûr de lui dès le premier jour où il est venu au monde et qui va l’être probablement jusqu’au dernier, ce n’est pas comme gérer un candidat normal à Saint-Jérôme. Le monsieur, il a des ambitions, il veut laisser sa marque, il va jouer évidemment dans la ligne du parti, mais il va colorier à côté aussi », souligne-t-il.

M. Tremblay-Pépin évoque l’objectif de Pierre-Karl Péladeau de faire l’indépendance et précise que pour atteindre cet objectif, il aura sûrement à travailler sur son charisme. « On dirait qu’on a remarqué qu’une chose, c’est qu’il y a un milliardaire qui veut faire l’indépendance, mais la question est la suivante : est-il capable de convaincre pour faire l’indépendance? Être milliardaire ne suffit peut-être pas à cette tâche-là », raisonne le jeune homme.

Que PKP veule l’indépendance c’est une chose, mais est-ce vraiment ce que le PQ souhaite? De l’avis de Simon Tremblay-Pépin, le parti de Pauline Marois a plutôt intérêt de jouer ses cartes du nationalisme plutôt que celles du souverainisme. « Pour chasser sur les terres de la CAQ, il y a été préférable de jouer les cartes nationalistes. Pour moi, la Charte des valeurs est un projet identitaire et nationaliste qui correspond à là où l’électorat de la CAQ est rendu. Cette proposition-là, elle a marché. C’était une bonne stratégie », explique-t-il.

Le candidat pour Québec solidaire dans la circonscription de Hull, Benoit Renaud, a d’ailleurs tenu à aborder cette question de l’indépendance que le PQ semble frigide à aborder. « Ce que je trouve fascinant dans la dynamique de la campagne électorale en cours c’est que le Parti Québécois a trouvé le moyen de parler juste assez de souveraineté pour rallier les fédéralistes contre eux et avec le Parti libéral, mais sans prendre le genre d’engagement clair qui permettrait de rallier le camp souverainiste derrière leur parti », note-t-il.

« Le Parti Québécois a vidé le projet national de sa substance progressivement à travers son histoire au point où maintenant, il ne reste plus rien. On prie les gens de voter pour le PQ parce qu’il a encore cette enveloppe-là, même s’il n’y a plus rien dedans. La stridence, la vocifération et l’intensité de la rhétorique sont inversement proportionnelles à la substance », ajoute M. Renaud.