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Arts et culture

Lettre d’Europe : À la recherche des différences

9 Décembre 2013

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– Par Alex Jürgen Thumm –

Les dernières manchettes de La Rotonde portent sur le référendum sur les Assemblées générales. Par curiosité, j’ai demandé à mon coloc si un référendum étudiant serait même pensable en Allemagne d’après lui. La réponse, tout court, est non ; sans débats, sans journaux étudiants, quelle question serait posée et qui s’y intéresserait?

Mon coloc m’a pourtant fait part d’un vote qui aura lieu d’ici peu à l’École pédagogique de Fribourg : un vote pour fonder un Comité constitué des étudiant.es (AStA). Interdits dans le bundesland de Bade-Wurtemberg jusqu’en 2012, les AStA existent depuis longtemps dans 14 autres États (la seule exception étant la Bavière, toujours le semeur de trouble dans la république fédérale). Les AStA détiennent un mandat légal du bundesland pour représenter officiellement les étudiants politiquement et s’inscrivent dans un réseau complexe d’organismes représentants. Il me semble que leur système de représentation étudiante est probablement plus sophistiqué que le nôtre (après tout, on a bloqué les frais de scolarité), mais la participation, la transparence et l’intérêt laissent à désirer.

Dans ce pays où je trouve des graffitis tels que « Go vegan! » et des autocollants dans les salles de classe m’incitant à « combattre la terreur fasciste », il y a certaines curiosités qui font oublier le progressisme des Allemands. Un tribunal vient d’interdire la campagne de publicité « Don’t be a maybe » de Malboro, mais des pubs de tabac, on en voit encore. Quelques restaurants et presque tous les bars maintiennent une section fumeuse. Une zone fumeuse se trouve sur tous les quais de gare et à l’aire des bagages dans l’aérogare.

Je suis sûr que bien des parents sont troublés par l’éloge du tabagisme, mais manifestement la société n’y trouve aucun tort. En effet, encore pire que les pubs de cigarettes pour les yeux d’enfants dans l’imaginaire allemand, est la traversée illégale de la rue. On me dit qu’en règle générale, on peut se la permettre, mais jamais devant des enfants : on court le risque d’une amende pour ne pas avoir été « exemplaire » : Sois pas unvorbildlich!

Je m’habitue de plus en plus à l’université allemande. Des fois volontiers, des fois à contrecœur. J’ai volontiers déboursé 4 € (5,75 $) pour un recueil de textes d’une épaisseur qui coûterait 60 $ à Ottawa. À contrecœur, je devrai le lire. Il est pour un séminaire intitulé « La politique du centre : la fin de la droite et de la gauche? ». Le prof insiste qu’on suive maximum trois cours/séminaires à la fois pour ne pas avoir trop de travail, mais pour ne pas retarder mes études à Ottawa, je dois en suivre quatre.

Le modèle d’apprentissage en Allemagne est pas mal exemplaire ; si on introduirait le concept d’un plan de cours exhaustif, il serait certes réussi. Le terme général pour tous les types de cours offerts est « Lehrveranstaltung », littéralement « évènement d’apprentissage ». Déjà à partir de la deuxième ou troisième année en sciences sociales, on suit principalement des séminaires et non des « exposés ». Chacun est composé de dix à quinze étudiants typiquement, faisant en sorte que les séminaires sont nombreux et proposent des thématiques très particulières. À cause du ratio, bien entendu, un grand personnel enseignant est requis et le modèle ne verra donc jamais le jour au Canada.

Parmi mes quatre cours, je n’ai qu’un seul examen ce semestre. Ma note portera par conséquent sur mes dissertations et mes exposés en classe selon le modèle traditionnel du Referat. Dans mon séminaire sur la politique du centre, ces exposés ont plus ou moins déchargé le prof de préparation de contenu.

Le Referat : on discute d’un thème prédéterminé et on propose une thèse. Chaque personne, qu’on travaille en groupe ou non, blablate pendant dix minutes et puis dirige la période de discussion qui suit. Ce n’est pas épouvantable. Deux profs n’ont pas même pris des notes durant le mien, ils n’ont qu’écouté.

Je perçois bien des avantages scolaires de tout ça, mais ça nuit à mon état d’esprit. Seulement quatre séminaires, moins de deux heures par semaine chaque, mais davantage de travail exigent énormément d’heures solitaires devant l’écran d’ordi et sans de bonnes places de travail sur le campus, je passe ces heures dans ma chambre.

Pour les uns, vivre à l’étranger leur fait voir les différences. Moi, je crois que j’appartiens aux autres pour qui les ressemblances ressortent principalement. Mon université d’accueil me plaît, toutefois je ne peux pas constater que la vie universitaire allemande me plaît mieux qu’à Ottawa, qu’elle me fait vouloir continuer avec mes études. Il demeure quelque chose qui manque, probablement au niveau de la vie et de l’esprit étudiant. À déterminer une autre fois.

La formation de la coalition fédérale en Allemagne entre les démocrates chrétiens et les sociaux-démocrates a pourtant été beaucoup plus intéressante que les études dernièrement. Peut-être que je suis trop optimiste, mais plus de bien semble avoir été accompli dans les dernières semaines au cours des négociations que durant, j’sais pas, la dernière décennie au Canada. Les coalitions, ça vaudrait la peine chez nous!

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