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Opinions

L’écho de la colline n°8 – Un résumé de la politique fédérale

28 novembre 2016

Par Benjamin Doudard, étudiant en communication et science politique à l’Université d’Ottawa

La controverse des levées de fonds reprend de plus belle – En campagne électorale, les troupes de Justin Trudeau ont misé sur le changement et la transparence, mais voilà que des nuages viennent assombrir les voies ensoleillées si chères au Premier ministre et aux libéraux au pouvoir. En effet, le gouvernement a essuyé de nouvelles critiques la semaine dernière alors que l’on apprenait, suite à une révélation du Globe and mail, que le Premier ministre Trudeau avait participé à un cocktail privé de levée de fonds du Parti libéral en mai dernier où les billets se seraient vendus à 1 500$ la place, organisé dans la résidence torontoise d’un homme d’affaire chinois, le président de la Chambre de commerce Canada-Chine. Plusieurs représentants de l’État chinois ainsi que du Parti communiste chinois auraient également été présent à cette soirée privée.

Après la ministre de la Justice et le ministre des Finances, c’était donc au tour du Premier ministre de se retrouver sous les critiques de l’opposition en ce qui concerne les levées de fonds partisanes. Pour Emmanuelle Latraverse, chroniqueuse à Radio-Canada : « Cette fois-ci, le premier ministre ne pourrait plus se dissocier de cette nouvelle méthode de financement, où le Parti libéral du Canada marchande l’accès à ses plus influents décideurs. » Du côté du gouvernement, on continue à clamer l’innocence et le respect des règles en place, qui seraient parmi les plus rigides au monde, tout en pointant du doigt les fautes commises par le Parti conservateur au même niveau par le passé. De plus, le Premier ministre justifie cette soirée comme étant dans l’intérêt des Canadiens, faisant partie de ses efforts pour attirer les investissements chinois au Canada.

Le libre-échange et le commerce international au cœur des discussions – Lundi, mardi et mercredi dernier, les élus de la Chambre des communes se sont penchés sur le projet de loi C-30, soit le projet de loi visant à implémenter l’Accord économique et commercial  global, l’AECG (CETA, en anglais), signé le 30 octobre dernier. Les conservateurs et les libéraux ont vanté les mérites et les bienfaits du libre-échange pour l’économie et ses bénéfices pour le secteur de l’emploi. Les conservateurs ont félicité deux des leurs, les anciens ministres Ed Fast (Commerce international) et Gerry Ritz (Agriculture), qui ont accompli une grande partie des laborieuses négociations lorsqu’ils siégeaient au gouvernement. De son côté, le Nouveau Parti démocratique, qui insiste sur le fait qu’il n’est pas contre le principe du libre-échange, met en garde contre l’Accord, qu’il ne faut pas ratifier aveuglément sans bien le comprendre et connaître ses implications. En outre, le parti dénonce que le projet de loi d’implémentation de l’Accord ait été introduit en Chambre dès le lendemain de sa signature, ce qui n’a pas laissé suffisamment de temps aux élus pour le lire et le comprendre, et ainsi pouvoir le débattre exhaustivement.

Cela dit, l’AECG n’est pas le seul accord de libre-échange qui se retrouve au centre des discussions en ce moment. En effet, depuis l’ascension de Donald Trump à la présidence des États-Unis, de nombreuses discussions portent sur l’ALÉNA (l’Accord de libre-échange nord-américain), en vigueur depuis 1994 et qui risque d’être renégocié. Bien entendu, cela fait peur aux producteurs de bois d’œuvre et de bétail canadien, deux secteurs que le président-désigné Trump souhaite renégocier. Les conservateurs critiquent le premier ministre de s’être montré ouvert à revoir des éléments de l’ALÉNA.

Finalement, le PTP (Partenariat Trans-Pacifique) – un accord auquel les conservateurs auront travaillé au courant de leur dernier mandat et qui fut conclu et signé en février 2016 sous la gouverne libérale – risque de mourir. En effet, Donald Trump a annoncé qu’il comptait se retirer du partenariat dès son premier jour à la Maison blanche.

Sommet de la Francophonie – Après sa première visite officielle en Amérique du Sud, c’est en Afrique que s’est rendu pour la première fois le Premier ministre la semaine dernière, s’arrêtant d’abord au Libéria, où il s’est entretenu avec la présidente et récipiendaire du prix Nobel de la paix Ellen Johnson Sirleaf, abordant avec elle la question des droits de la personne, et plus particulièrement celui des femmes et des membres de la communauté LGBTQ. C’est par la suite à Antananarivo, à Madagascar, que s’est rendu Justin Trudeau, à l’occasion du Sommet de la Francophonie, tenu par l’Organisation internationale de la Francophonie. Une fois de plus, le Premier ministre canadien a fait des droits humains l’élément central de son allocution, dénonçant notamment la pratique de la mutilation génitale féminine, courante dans certains pays membres de la Francophonie. Il y a également abordé l’enjeu de la sécurité, notamment la lutte contre la radicalisation et le terrorisme. Autre point à l’ordre du jour lors du sommet : la candidature de l’Arabie Saoudite, un pays critiqué pour ses violations des droits humains, qui souhaite se joindre à l’OIF. La décision quant à son adhésion a été reportée. Par ailleurs, durant le sommet, l’Ontario a obtenu le statut d’observateur de l’OIF, que la province convoitait depuis déjà plusieurs années. Le Nouveau-Brunswick et le Québec sont quant à eux des membres à part entière de l’organisation depuis plusieurs décennies.

3 nouvelles en bref

Le gouvernement a annoncé qu’il retirerait des modifications à la loi électorale qui avaient été introduites sous le précédent gouvernement conservateur, tout en ajoutant de nouvelles mesures pour renforcer le processus électoral. À la tête d’un gouvernement majoritaire, les conservateurs avaient fait passer, en 2014, un projet loi intitulé Loi sur l’intégrité des élections, que de nombreuses critiques avaient dénoncé comme limitant l’accès au vote, principalement à des électeurs non-conservateurs. Les mesures conservatrices, qui seront retirées de la Loi électorale du Canada sous peu, comprenaient entre autres le fait de ne plus pouvoir voter avec une simple carte de l’électeur, reçue par la poste ainsi que de ne plus pouvoir se porter garant pour un électeur qui n’a pas avec lui de pièce d’identité ou la carte de l’électeur. Plusieurs nouvelles mesures sont incluses dans le projet de loi que les libéraux comptent présenter, notamment de donner plus de pouvoir au Directeur général des élections ainsi que de créer un « Registre national des futurs électeurs », pour préinscrire les jeunes de 14 à 17 ans.

La semaine dernière, la question du financement et du mandat de la Société Radio-Canada (SRC) s’est immiscé dans les débats de la course à la chefferie du Parti conservateur. La société d’État, qui reçoit une partie de son financement du fédéral, devrait se concentrer davantage sur les affaires publiques et moins sur les sports et la cuisine, selon le candidat Maxime Bernier, qui compte aussi réduire son financement. La candidate Kellie Leitch a quant à elle simplement appelé à son démantèlement, sur son compte Twitter. Tony Clement, un candidat qui avait fini par retirer sa candidature de la course, avait récemment critiqué les subventions versées par l’État à la SRC et avait appelé à une réduction importante de ce financement. Sous les conservateurs, entre 2006 et 2015, CBC/Radio-Canada avait subi de multiples coupures à son budget, ce qui avait obligé le diffuseur public à supprimer plusieurs centaines d’emplois.

Le Canada doit renouveler sa flotte d’avions de chasse, un dossier qui brasse depuis déjà plusieurs années. Le sujet faisait déjà beaucoup jaser sous les conservateurs, qui souhaitaient garnir la flotte canadienne des avions F-35 du constructeur Lockheed Martin sans tenir d’appel d’offres. Les avions CF-18, dont dispose le Canada actuellement, sont en fin de vie et le ministre de la Défense Harjit Sajjan a annoncé la semaine dernière l’intention du gouvernement d’acquérir 18 avions Super Hornet du constructeur aérien Boeing, qui permettraient de constituer une « flotte provisoire » qui assurera au Canada de pouvoir maintenir ses obligations auprès de l’OTAN, notamment. À terme, ce sont 77 avions CF-18 qui devront être remplacés, mais cela devrait prendre encore plusieurs années.

Le hashtag de la semaine – #TrudeauEulogies, c’est le hashtag qui a été lancé sur Twitter après que le Premier ministre ait émis une déclaration jugée trop complaisante, à la suite de la mort de l’ancien président cubain et guérillero Fidel Castro. Dans cette déclaration, le Premier ministre évoquait notamment les «importants progrès dans les domaines de l’éducation et des soins de santé» entrepris par l’ancien chef d’État, décrit comme un «révolutionnaire et orateur légendaire». Les tweets satiriques employant le hashtag incluaient des hommages à Hitler, Staline ou encore Kim Jong-il. Dimanche, en marge du Sommet de la francophonie, le Premier ministre a été pressé par une journaliste de préciser s’il croyait que le Lider maximo avait été un dictateur, ce à quoi il a répondu « oui ». Voulant apaiser la tension, il a également tenu à souligner qu’il avait abordé la situation des droits humains avec Raúl Castro, lors de sa récente visite à Cuba.

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