Le département des campagnes 2012-2013: Incompétent, inutile, désorganisé, anti-francos.
– Par Caroline Ramirez –
La Rotonde, constatant le statut « en construction » de la page consacrée au département des campagnes de la Fédération étudiante de l’Université d’Ottawa (FÉUO) depuis mai 2012 et l’absence de présentation de quelconques résultats, a voulu en savoir plus sur les réalisations et l’intérêt de ce département. Le département des campagnes, de l’avis de nos sources, serait la section la moins efficace de la FÉUO, et Liz Kessler, chargée de son fonctionnement, serait la plus incompétente des élus de l’année 2012-2013.
Le département a fonctionné grâce à une équipe de trois personnes à temps plein durant l’été 2012, puis de deux employés à 20 h par semaine à partir du mois de septembre. Liz Kessler, vice-présidente aux affaires universitaires, est censée superviser leur travail, avec l’aide du président de la Fédération, Ethan Plato, et de la coordonnatrice de l’exécutif, Amy Hammett.
S’interrogeant sur le fonctionnement du département des campagnes, La Rotonde a interrogé plusieurs personnes évoluant autour de la FÉUO et/ou parmi ses employés, qui ont parfois souhaité garder l’anonymat.
Une élue « incompétente » et « payée à ne rien faire »
D’après nos sources, la vice-présidente sortante aux affaires universitaires n’aurait tenu presque aucune de ses intentions électorales, à l’instar de la charte des droits des étudiants en résidence, qui constituait pourtant le « diamant sur la couronne de sa plateforme politique », d’après une source qui s’attarde sur l’incompétence de l’élue: « Liz Kessler questionne la moindre décision, elle veut tout contrôler alors qu’elle est complètement incompétente: elle s’attend à être considérée comme une patronne sans faire les tâches que l’on attend d’une patronne. » Sans aucune hésitation, notre source affirme que « Liz Kessler a été payée 32 000 $ à ne rien faire. C’est un total gaspillage d’argent et une atteinte à la confiance qui lui a été accordée par les étudiants qui ont cru en ses promesses. »
Une autre source ajoute: « On peut dire que l’organisation a fait un bon travail de dissimulation de l’inaction de Liz Kessler. […] À partir du début de la session d’hiver, Liz ne venait même plus au bureau et continuait à être payée. » Toutefois, selon Liz Kessler : « Il n’y a rien dans la Constitution qui dit qu’on doit avoir des heures de bureau. On a une entente entre les membres de l’exécutif qui dit qu’on va être au bureau un minimum d’heures chaque semaine. […] Il y a parfois des gens qui demandent que l’on fasse des heures de bureau mais, personnellement, je pense que c’est plus efficace de promouvoir le fait que les étudiants peuvent prendre rendez-vous avec nous. » Adam Gilani, vice-président sortant aux finances, constatant la mauvaise gestion du budget attribué au département des campagnes pour la période de mai 2012 à avril 2013, explique que « c’était un problème en lien avec le fait que la vice-présidente qui est responsable pour les campagnes n’était pas vraiment là cette année. Elle n’a pas vraiment fait de suivi. C’est elle qui est responsable des approbations avant que les dépenses soient faites. »
Une rencontre semestrielle obligatoire mais négligée par l’exécutif de la FÉUO
La Constitution de la FÉUO indique dans son article 3.12.4.3.b relatif aux réunions du département des campagnes, qu’« un minimum d’une (1) réunion aura lieu par session d’automne et d’hiver ». Or, aucune rencontre n’a eu lieu à l’automne 2012. Les campagnes organisées par la FÉUO sont choisies notamment en fonction des discussions issues de ces forums démocratiques, fonctionnant comme des assemblées générales.
D’après nos sources, cette omission « révèle avec puissance les dangereux dérèglements du département des campagnes ». L’élue n’est toutefois pas la seule en cause, car plusieurs couches composent le problème du comité des campagnes: les employés n’auraient pas fait non plus un travail sérieux et responsable.
Un département désorganisé et des moyens de communication déficients
D’après nos sources, les employés du département des campagnes, Nicole Desnoyers et Iain Brannigan, n’ont fait qu’accentuer le caractère dysfonctionnel de cette structure, ajoutant leur propre incompétence à celle de leur responsable: « Desnoyers et Brannigan n’ont rien fait du tout pour les 34 000 membres de la Fédération étudiante depuis le début de la session d’automne 2012: ils se sont contentés de faire de l’organisation communautaire à l’extérieur et n’ont rien fait pour ce campus. » Nicole Denoyers a refusé de nous rencontrer, affirmant d’abord qu’elle devait « demander l’autorisation à sa
superviseure », avant de nous envoyer un courriel nous demandant de contacter seulement Liz Kessler « pour toutes entrevues par rapport au département des campagnes ». M. Brannigan n’a pas répondu à nos demandes d’entrevue malgré son assurance, lors d’une brève discussion en face-à-face, de son intention de discuter avec nous du département des campagnes.
Nos sources affirment par ailleurs que le personnel actuel du département des campagnes a négligé des standards établis de longue date, décevant les bénévoles et les partisans des campagnes de la FÉUO. Entre autres, les bénévoles sont supposés avoir une réunion par semaine pour organiser leur travail. Mais, à partir de la deuxième semaine du mois d’octobre 2012, il n’y a plus eu aucune rencontre. Lorsque La Rotonde a demandé au détour d’un couloir à M. Brannigan pourquoi les rencontres de mobilisation autour des campagnes, censées avoir lieu tous les mercredis de
18 h à 20 h d’après le prospectus du département, n’avaient plus lieu, l’employé a répondu: « La participation n’a cessé de diminuer, alors on a arrêté d’organiser ces rencontres ». De l’avis de nos sources, M. Brannigan aurait toutefois continué à donner aux bénévoles de l’information sur les manifestations et à les inciter à se joindre aux cortèges, insistant sur le fait que le prix du déplacement serait payé par la FÉUO.
Il semble donc que le département des campagnes, avec un budget de
115 340 $, ne soit pas parvenu à mettre en place des moyens efficaces de communication et de rencontres, qui auraient permis d’assurer un minimum de transparence à son fonctionnement et d’inspirer confiance aux membres. Ainsi, La Rotonde n’a reçu aucun courriel d’informations hebdomadaires sur les campagnes depuis le mois d’octobre 2012. En ce qui concerne le fait que le site internet du département soit en construction depuis le début de l’année, Liz Kessler affirme « que c’est parce qu’on n’a pas de webmestre en ce moment. L’ancienne est partie et puis on n’a pas eu l’occasion d’embaucher une nouvelle personne. »
Des actions poudres aux yeux, inutiles à l’avancée des causes sur le campus
De l’avis de nos sources, l’ensemble du département des campagnes est sclérosé par l’attitude des employés et des élus, qui ne prennent aucune responsabilité et préfèrent rejeter la faute les uns sur les autres, sans produire aucun travail véritablement constructif. Un moyen employé pour cacher cette apathie commune a consisté à mettre en avant des campagnes tape-à-l’œil: on peut évoquer l’absence d’impact réel sur le campus de l’Université d’Ottawa de la très forte implication du département dans la grève étudiante québécoise, dès le début de l’été 2012. Selon l’une de nos sources, « le mot d’ordre était “Solidarité”, mais il s’agissait en fait d’un moyen de distraction car, pendant la durée de la grève étudiante, les campagnes touchant directement les membres de la FÉUO et répondant à leurs besoins ont été largement négligées. » Pour évaluer la pertinence de cette conviction, nous pouvons nous pencher sur quelques-unes des campagnes « actives » du département:
– Garderies: Rukiya Mohamed, coordonnatrice en sensibilisation au Centre de ressources des femmes et dont une partie du mandat consiste à travailler sur les campagnes, remarque que « l’accent et l’orientation du département des campagnes, et de l’activisme de la FÉUO plus largement, a généralement été mis sur l’organisation d’actions “sexy”, qui impliquent des manifestations. » Si elle reconnaît que ce type de choix n’est ni mauvais ni inutile en soi, elle affirme qu’il « s’avère problématique quand il devient notre unique forme de militantisme car, dans ce cas, on oublie de s’engager dans des actions durables, pour des campagnes telles celles pour faciliter la garde d’enfants ou pour assurer la décolonisation du campus: ces campagnes seraient directement profitables aux étudiants ». Cette tendance est révélatrice des priorités de la FÉUO, d’après Mme Mohamed: « Les besoins et les voix des étudiants sont négligés et dominés par une petite minorité qui clique ensemble pour empêcher les initiatives à long terme et durables qui amélioreraient pourtant les conditions de vie des étudiants. » Mme Mohamed conclut, un peu amère : « Il faut croire que les Black Blocs sont bien plus palpitants que les garderies. »
– « À bas les frais »: Nos sources se sont montrées très critiques à l’égard d’« À bas les frais », rappelant l’utilisation par la FÉUO de matériel plastifié et produit à la chaîne par la FCÉÉ, ne correspondant pas aux défis propres du campus en lien avec une éducation abordable. La Rotonde constate en effet que cette campagne n’est pas parvenue à se fixer des buts spécifiques adaptés à l’Université d’Ottawa et a adopté une approche répétitive et ennuyeuse, éprouvant de fait de la difficulté à amener les étudiants à participer sur la durée. Le département des campagnes n’est pas parvenu à s’approprier et à évaluer démocratiquement la pertinence d’une telle action, adhérant au fonctionnement du haut vers le bas de la FCÉÉ et à sa tendance à définir des lignes politiques à l’emporte-pièce, ensuite appliquées telles quelles à des réalités locales qui nécessiteraient une réadaptation totale, selon nos sources.
– Solidarité entre étudiants et travailleurs: Le personnel de la FÉUO, en dépit de sa négligence à l’égard de plusieurs des campagnes, est parvenu à lancer cette campagne « très large et pleine de vide pour justifier les déplacements à toutes ces manifestations ou rencontres d’organisations externes », d’après l’une de nos sources. Cette campagne aurait été une « couverture pour les activités hors campus d’[Iain] Brannigan », activités qui n’avaient pas grand rapport avec les expériences vécues des étudiants et des ouvriers sur le campus.
Le français et les francophones? Des « emmerdements » pour la FÉUO
Un autre point problématique soulevé par nos sources est le fait que le département des campagnes de la FÉUO et les personnes travaillant avec lui ont une approche absolument irrespectueuse de la langue française et des francophones. Une de nos sources raconte: « J’ai de nombreuses fois entendu: “Ça ne sert à rien que l’on fasse des efforts car les francophones, et ces journalistes de La Rotonde, vont se plaindre et nous critiquer dans tous les cas, parce qu’ils nous détestent”. »
Nos sources rapportent également la mauvaise grâce avec laquelle certains élus et employés envisagent d’améliorer leur français: « Iain Brannigan est exclusivement anglophone. Comme plusieurs employés de la Fédération, on lui a payé des cours de français mais il n’y est jamais allé. Pourtant, [Iain] Brannigan travaille pour le département des campagnes depuis deux ans. Mais il n’a fait aucun effort pour apprendre le français alors que, dans leur contrat, les employés sont supposés parler les deux langues. » Lors de notre bref entretien avec M. Brannigan, nous avons en effet pu constater que, s’il comprenait en partie le français, il était incapable de le parler. Adam Gilani explique pour sa part que « Iain était inscrit dans un cours de français. Il l’a suivi pour la première session et, pour la deuxième session, il l’a laissé tomber. »
Nos sources affirment également qu’au département des campagnes et dans les couloirs de la FÉUO, les discours tenus considèrent le français comme « une réflexion secondaire, un emmerdement, un truc que tu n’as pas le choix de faire. Les francophones sont inclus à contrecœur dans les projets ». Un autre exemple de la difficulté à intégrer le français dans la pensée politique peut ainsi être pris dans le prospectus du département, intitulé Campagnes de la Fédération étudiante. À l’intérieur, on trouve de nombreuses fautes de français, en plus des mauvaises formulations: « ils ont réagit », « font non-seulement », « sont débarqués », « n’ont pas signés », « se sont fais », « injustices auxquels »…
Le cycle de fonctionnement du département des campagnes
D’après nos sources, si les quatre mois d’été sont utilisés pour préparer l’année et que la semaine 101 marque ensuite le véritable lancement des campagnes, on réalise bien vite qu’avec la semaine de relâche du mois d’octobre et les examens de mi-session, les projets sont progressivement ralentis jusqu’en décembre et les examens finaux. L’une de nos sources affirme: « Les ressources de la communauté étudiante et le travail du personnel de la FÉUO sont purement et simplement perdus durant la période des élections parce qu’ils ont une attitude aristocratique: “Ok, la chose la plus importante maintenant, c’est de s’assurer d’être réélus.” […] C’est du népotisme. » Ainsi, tout le travail aurait lieu seulement durant les mois de septembre, octobre et novembre. Il semble en effet justifié de se demander quel travail a pu être accompli par le département tandis que l’une des employés, Nicole Desnoyers, briguait le poste de vice-présidente aux affaires de l’équité.
Nos sources sont finalement très sceptiques quant au rôle du département des campagnes 2012-2013. « Au département des campagnes, pas grand chose n’a été fait de toute l’année. Pourtant, il y a deux personnes qui sont payées 20 h par semaine mais il n’y a aucun résultat qui sort de ce département. Comment peut-on justifier une telle situation? » Adam Gilani s’inquiète pour sa part de la non-utilisation des fonds attribués en début d’année au département. Jusqu’à la mi-janvier, seuls 58 744 $ des 115 340 $ du budget avaient été utilisés, parmi lesquels 37 033 $ en salaires et 7948 $ en publicité. Pour le vice-président aux finances sortant, s’il n’y a pas eu beaucoup de dépenses cette année, c’est parce qu’il n’y a pas eu beaucoup de travail. « Le principe de la Fédération, en tant qu’organisme sans but lucratif, c’est d’utiliser tout le budget dans l’année où on l’a. Si quelqu’un ne le fait pas, si quelqu’un a un grand surplus ou un grand déficit, c’est quelque chose de mal », ajoute-t-il.
Pour nos sources, le problème fondamental du département des campagnes est à mettre en lien avec la perpétuation de stratégies éculées et une approche politique répétitive, dépourvue de tout sens critique. « Ils ne questionnent rien… Ni les manifestations, ni les pétitions, ni la campagne “À bas les frais”! […] Éveiller l’attention des gens, c’est bien, les actions directes, c’est bien aussi, mais seulement quand c’est dans le contexte d’un plan cohérent pour le campus. Je peux affirmer sans aucune hésitation que le département des campagnes a trahi les membres de la FÉUO et la confiance de ceux dont ils devraient se sentir redevables. »