– Par Hamdi Souissi-
Hazel Gashoka, ancienne sénatrice étudiante, a reçu, le 18 décembre 2012, une lettre de Richard Dearden, avocat de Joanne St. Lewis dans la cause en diffamation intentée contre Denis Rancourt. Me Dearden a envoyé cette lettre en réaction à une vidéo de Mme Gashoka où cette dernière donne son avis sur la poursuite mentionnée plus tôt. Selon M. Dearden, cette vidéo serait diffamatoire et malicieuse. Il a exigé son retrait dans les plus brefs délais. Chose qui n’a toujours pas été faite.
« Je suis d’accord avec Denis Rancourt. Je dirais que Joanne St. Lewis a agi comme la reine nègre d’Allan Rock », soutient Mme Gashoka dans ladite vidéo. Étant elle-même une personne de race noire, Mme Gashoka fait référence au rôle que la professeure St. Lewis a joué en critiquant le rapport du Centre de recours étudiant (CRÉ) qui indique qu’il y aurait un racisme systémique et institutionnalisé par l’Université d’Ottawa (U d’O).
Le mercredi 27 février, Mme Gashoka a tenu une conférence à la rotonde du pavillon Tabaret de l’U d’O. Après une mise en contexte, présentée par Joseph Hickey, Mme Gashoka y est allée d’une courte intervention. Elle a rappelé avoir déjà été victime de racisme sur le campus de l’U d’O. Elle a conclu sa conférence en ces termes: « Mme St. Lewis, ne me poursuivez pas. Pas avant que nous ayons eu une discussion publique sur la question du racisme à l’U d’O, avec moi, vous-même et plusieurs autres intervenants. » En plein milieu de son intervention, Mme Gashoka a été interrompue par des huées en provenance d’un groupe venu affirmer son soutien à Mme St. Lewis.
Une des membres de ce groupe, Farida Adam, a d’ailleurs pris la parole immédiatement après pour émettre des doutes sur le fait que Mme St. Lewis menacerait de poursuivre Mme Gashoka. En réaction, Mme Gashoka et M. Hickey ont distribué des copies de la lettre d’avocat à l’auditoire. Plusieurs autres intervenants se sont succédés au micro, presque tous pour soutenir Mme St. Lewis et condamner M. Rancourt et Mme Gashoka. Plusieurs de ces étudiants appartiennent à la Black Law Students Association (BLSA) ou ont suivi les cours de Mme St. Lewis. Une lettre non-signée et intitulée « Counter-Factuals » a été distribuée pendant l’allocution de Mme Gashoka. Nous avons pu retrouver l’auteure de la lettre, Iman Amin, membre de la BLSA. La lettre comporte une série d’accusations qui vont même jusqu’à reprocher au Centre de recours étudiant (CRÉ) de soutenir le racisme.
Mireille Gervais, directrice du CRÉ nous a fait part de son indignation face à cette lettre. « Ils assimilent mes actions à celles de Denis Rancourt et Hazel Gashoka, alors que ce sont tous des dossiers distincts », a-t-elle souligné. Mme Gervais considère également que la lettre est truffée de contradictions, qu’elle détourne les faits, tire des conclusions rapides, procède par exagération et intente des procès d’intention. La lettre accuse ouvertement M. Rancourt de racisme. Interrogé à savoir s’il considérait que M. Rancourt était bel et bien raciste, le président de la BLSA, Christien Levien, visiblement agacé par cette question et après un instant de réflexion, a été plus nuancé que ses camarades: « Pas nécessairement. Cependant ses actions posent problème et contribuent à propager le racisme. »
« Les gens ont droit à leur opinion. Je ne poursuivrais pas ces gens en diffamation, car je prône le dialogue et l’échange plutôt », a répondu M. Rancourt qui rejette en bloc les accusations de racisme. « En fait, si l’on consulte mes blogues ou mes livres, il me semble évident que je me situe plutôt du côté de l’antiracisme. »
L’U d’O prend ses distances
Par le biais de Caroline Milliard, gestionnaire des relations avec les médias, l’U d’O a tenu à préciser qu’elle ne financerait pas les frais juridiques qui seraient encourus par une éventuelle poursuite de Mme St. Lewis envers Mme Gashoka. Rappelons que l’U d’O a reconnu qu’elle rembourserait, sans limite, les frais de Mme St. Lewis dans sa poursuite contre M. Rancourt au nom d’un devoir moral et du fait que Mme St. Lewis a été attaquée dans le cadre de ses fonctions. Il nous a été impossible de savoir pourquoi ce serait différent dans le cas de Mme Gashoka qui est menacée de poursuite pour avoir répété, et un peu développé, les propos de M. Rancourt.