Photo Emilie Azevedo
Par Miléna Frachebois – Journaliste
Les tatouages ? Quelle drôle d’idée ! Pourquoi vouloir se peindre le corps d’encre indélébile ? Et d’où vient cette coutume ? Pourtant, bien que peu d’historiens se soient consacrés à élucider l’histoire des tatouages, il peut être retracé à la préhistoire.
Le corps momifié d’un chasseur néolithique, remontant au Ve siècle av. J.-C, a été découvert en 1991 dans les Alpes italiennes. Il présentait sur son corps des petits dessins. C’est le plus vieil exemple de tatouage que l’on ait pu retracer à ce jour. D’autres découvertes ont par la suite été faites en Asie, en Égypte, etc.
Si au XXIe siècle les tatouages passionnent toujours, c’est pour leur côté artistique. Mathieu Désilets, tatoueur au studio Futur Skin, pratique depuis plus de 5 ans. Il est non seulement tatoueur, mais aussi graffiteur depuis 20 ans. Puisqu’il est difficile de faire des graffitis en hiver, il a décidé de se lancer dans les tatouages « pour combler ce vide ». Ce qu’il aime dans son métier : la gratitude qu’on lui donne en tant qu’artiste et la satisfaction de la liberté artistique. Cependant, il avoue avoir un métier difficile : aucune assurance ou pension, une instabilité financière et des matériaux qui coûtent très cher. Il mentionne aussi la difficulté de percer dans ce milieu : « Avant d’atteindre le niveau de tatoueur, ça peut prendre plusieurs années. Pas beaucoup de shops acceptent les apprentis, donc c’est difficile de percer et d’entrer dans le milieu ».
Des histoires uniques à raconter
Faire le choix de se dessiner sur le corps de façon indélébile, il y a bien une raison à cela ? La plupart des personnes sensibles à cet art décident de faire le pas parce qu’ils ont une histoire à raconter, à ne pas oublier : quoi de mieux que de le faire de façon permanente pour construire son identité ? Quelques personnes ont décidé de nous raconter leurs histoires.
- Andrea Franche, sciences biopharmaceutiques : « C’est quelque chose de très important pour moi parce que cela représente ma rémission d’un trouble de l’alimentation. Je suis pour les tatouages parce que je pense qu’ils sont une belle façon pour les personnes de s’exprimer ».
- Victoria Romero-Garcia, développement international et mondialisation : « J’ai décidé de faire un tatouage car je venais juste de sortir de l’hôpital après ma première tentative de suicide. Le tatouage dit “Save Myself 3:15”, ce qui est basé sur une musique par Ed Sheeran. De 3:15 jusqu’à la fin de la musique, cela relate à pourquoi j’avais des problèmes avant d’essayer de me suicider. Chaque jour quand je me lève et vois mon tatouage, cela me rappelle que je dois me protéger tous les jours ».
- Bailey Ulasik, criminologie : « J’ai décidé de faire un tatouage parce que j’ai toujours aimé les tatouages et je savais qu’un jour j’en voudrai un. Ils veulent tous dire quelque chose différent à mes yeux. Un que j’ai est en moi pour porter hommage à un ami qui a été emporté par la mort dans un accident de voiture. Un autre que j’ai en commun avec ma Nana avec son écriture est une phrase qu’elle m’a toujours dit depuis que je suis petite ».
- Sofia Umana-Pazos, baccaulauréat général : « Le premier tatouage que j’ai eu était une chouette que j’avais sur un pendentif. Elle représente la sagesse, comme mon nom en grec. Le second que j’ai eu est une chaîne de montagne. Ayant grandi sur la côte ouest en Alberta et en Colombie-Britannique, j’ai été exposée à la beauté de la neige sur la montagne, ainsi que toute la nature. Depuis que j’ai déménagé à Ottawa, je n’ai pas pu ressentir la même chose parce qu’il n’y a pas de montagnes ici ».
Quelques considérations à prendre au préalable
Si le tatouage permet de se souvenir de moments ou de choses importantes de nos vies, il faut tout de même se préparer avant de prendre une décision qui marque pour toujours.
- Aly Soto-Najera, sciences de l’activité physique : « Je regrette la position de mon tatouage, pas le tatouage en lui-même. J’ai fait du laser pour le retirer, il ne me reste qu’une fois. La façon dont ils sont permanents est le problème. Si vous avez de l’argent pour payer le laser, il n’y a pas de risques. Le coût du laser est dix fois plus cher que le tatouage lui-même ».
- Sofia Umana-Pazos, baccaulauréat général : « En étant en sciences de la santé maintenant, il y a plein de risques qui viennent avec les tatouages. Pour commencer, vous pouvez avoir une infection due aux aiguilles, ou faire une réaction allergique à l’encre. Une fois dans le flux sanguin, l’encre peut infiltrer votre système immunitaire et peut éventuellement diminuer la façon dont votre corps se défend contre les infections. Ces tatouages prennent du temps à être planifiés et à être appréciés ».
- Mhàiri Agnew, sociologie et anthropologie : « Le risque est seulement présent s’il n’y a eu aucune recherche avant de se faire tatouer. Si la personne a regardé à un artiste avant, a pris le temps de penser à l’art qu’il veut se faire tatouer et est mentalement bien située, je pense qu’il n’y aura aucun risque. Cependant, je pense que les tatouages impulsifs peuvent être risqués puisque les précautions n’ont pas été prises — comme de regarder les conditions sanitaires du magasin, ou l’expérience de l’artiste — et cela peut avoir des conséquences ».