Par Emmanuelle Gingras _ Cheffe du pupitre Arts et culture
Vous est-il déjà arrivé de vous rendre dans de grands centres d’art et de vous sentir tout à coup minuscule ? Je veux dire, pris sous les regards condescendants du public qui remarque que vous n’êtes pas habillé convenablement pour l’opéra ? Moi oui.
Un point est arrivé dans ma vie où je me suis écœurée de me tricoter le corps pour consommer de la tête. Entendons-nous que de consommer de l’art consiste avant tout à être auditeur, non pas l’œuvre à contempler. Mais encore, pourquoi représente-t-elle une convention et que crée-t-elle ?
Le respect pour l’art ?
Suite à un sondage et de nombreuses discussions, la majorité de mes témoignages en sont venus à la prochaine conclusion : bien s’habiller pour consommer de l’art est une façon de présenter son respect. Quand je parle d’art, je parle évidemment de réunion pour sa consommation, disons vernissage, spectacle, etc. Mais la prochaine question est à se poser : l’art demande-t-il à être respecté ? Cherche-t-il à plaire ou plutôt à éveiller ? Bon, on me dira que ses objectifs sont multiples, qu’il me faudrait bien plus de temps pour décortiquer le tout. Mais pourquoi une convention esthétique marque-t-elle le respect d’une œuvre quelconque ?
Pourquoi, alors que l’art parle la gueule grande ouverte, authentique et affamé de donner, en témoignons-nous tels de propres gentils bourgeois ?
Une occasion, des classes ?
Je fais du théâtre depuis plusieurs années et bon, je vous avoue qu’il s’agissait autrefois d’un plaisir pour moi de bien m’habiller quand j’y allais. La raison : je n’avais aucune autre occasion de porter de chics habits. Toutefois, à part la question de respect, il semblerait que la convention en soi est aussi justifiée par le rapport de la nouveauté, de l’inhabituel. Ainsi, consommer de l’art devient un lieu d’occasion, une réunion « non-habituelle ». Pour la plupart des gens plus exposés à l’art, j’ai su remarquer que la notion du bien paraître était moins importante puisqu’elle fait partie intégrante de leur mode de vie, ce qui s’est éventuellement appliqué pour moi aussi.
Toutefois, plus le spectacle ou l’artiste a de la « valeur » monétaire et de reconnaissance, plus le travail d’un artiste semble être respecté, et plus il semblerait que la formalité de la réunion suscite chez les gens la pression du bien paraître. Ne trouvons-nous donc pas ainsi que la réunion en soi présente un concept d’inaccessibilité aux arts considérés comme « respectables » à tous ?
Le paraître esthétique serait-il ainsi considéré comme un moyen de valoriser et réunir l’élitisme ?