–  Yasmine Mehdi – 

Camarades, aujourd’hui 1^er avril s’achève l’édition 2016 du Festival de la poutine. Si cette célébration de la francophonie a su faire sa place comme un incontournable de la vie étudiante, elle vient de prendre une dimension un peu plus… internationale. Dans la nuit de mercredi à jeudi, le bureau du président de la Fédération de Russie a publié un communiqué à l’intention du Service de vie communautaire (SVC) et de la Fédération étudiante de l’Université d’Ottawa (FÉUO). Dans celui-ci, Vladimir Poutine, président russe aux politiques peu consensuelles, manifeste sa gratitude envers les étudiants ottaviens qui ont organisé un festival en son honneur, et ce, sans que quelconque menace de sévices ait été formulée. Quiproquo ou hommage à un despote? La Rotonde fait le point.

Goutez. Répétez. Envahissez la Crimée.

« Son honorable Vladimir Poutine tient à transmettre ses remerciements les plus chaleureux aux organisateurs du Festival de Poutine, qui ont permis aux étudiants de l’Université d’Ottawa de célébrer les réalisations de l’illustre Président. » Voilà les mots qui ouvrent la déclaration qu’ont pu découvrir en se levant jeudi les membres de la communauté universitaire dans un communiqué du Kremlin publié à 3 h du matin, heure normale de l’Est.

Cette déclaration d’amitié a provoqué un véritable tollé au sein de la communauté étudiante. Depuis hier, bon nombre d’étudiants ont pris leurs armes de choix, les réseaux sociaux, pour partager au plus grand nombre leur indignation. La plupart se disent outrés que leur Université ait organisé un évènement en hommage à un dirigeant connu notamment pour ses politiques homophobes, son musèlement de la presse et sa grande tendance à indexer des territoires à l’improviste.

Le scandale a même dépassé les frontières du campus de l’U d’O. En effet, à l’heure d’écriture de cet article, le mot-clic #PasDePoutineSurMonCampus était le plus tweeté au Canada, avec des réactions de partout à travers le pays.

Evan Lamoureux, étudiant de 4^e année en anthropologie, explique par exemple sa colère : « Je n’en reviens pas; on parle de justice sociale à tout bon de champ, et après on retourne sa veste en organisant un évènement à la gloire d’un dictateur? » Katheryn Mouraud, en 3^e année en sciences infirmières, renchérit : « Tout le monde sait que Poutine est en réalité un communiste. C’est le nouveau Staline. La Russie ne représente en rien les valeurs de réussite néolibérale que prône notre belle université. Je veux que le nom de leur Roi décalisse des affiches placardées partout dans l’Université. »

Qu’en pensent les principaux intéressés?

Visiblement, la controverse ne s’est pas rendue jusqu’au pays des tsars. Tatyana Matveyev, agente de presse du Kremlin, était ravie de répondre aux questions du journal étudiant de l’Université chouchou du président : « Une visite est pour bientôt. Son honorable Poutine a déjà acheté un coton ouaté uOttawa et des discussions avec Allan Rock sont en cours. »

À l’inverse, aucun des représentants du SVC ou de la FÉUO, organismes qui ont travaillé de pair pour l’organisation de ce festival, n’a souhaité nous répondre. Une source anonyme proche de la Fédération étudiante a livré une information particulièrement choquante afin d’expliquer ce mutisme : « Clairement, il s’agit d’un malentendu, mais la vérité, c’est qu’on ne sait pas trop quoi dire. Vladimir Poutine a personnellement contacté l’exécutif de la FÉUO pour leur dire qu’en signe de gratitude, il rembourserait la dette du régime d’assurance santé… Ils étaient un peu mal à l’aise de lui dire la vérité, vous comprenez? »

Bien que cette rumeur semble tirée par les cheveux, elle expliquerait le silence des organisateurs de l’évènement. Qui sait, peut-être que la solution pour régler pour de bon tous les problèmes d’argent des universités serait d’organiser des évènements à la gloire de dictateurs. Pendant ce temps, on murmure déjà des allusions au lancement d’un Festival du Baklava Bachar Al Assad.