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Arts et culture

Femmes d’influence: la sanza soul de Laetitia Zonzambe

20 octobre 2018

Par: Miléna Frachebois, journaliste 

Arrivée au Canada en 2009, l’auteure-compositeure-interprète Laetitia Zonzambé laisse sa marque sur la scène musicale canadienne. Sa persévérance et sa capacité à s’adapter à son environnement ont fait d’elle l’artiste qu’elle est devenue.

La Rotonde :  Pouvez-vous brièvement vous présenter ?

Laetitia Zonzambé: Je suis originaire de la République centrafricaine, je suis arrivée à Montréal en 2009. Mon parcours artistique a commencé en République centrafricaine. Quand je suis arrivée à Montréal, j’ai dû tout reprendre à zéro ; sur un nouveau territoire, il faut te recréer un réseau de contact, voir ce qu’il se passe ici au niveau de la musique, dans mon style, appelée ici la musique du monde. J’ai 42 an, je suis mariée et j’ai un enfant.

LR : Quel type de musique ? De chansons ?

LZ: J’ai récemment fait un album appelé Sanza Soul et c’était un nom aussi que j’ai donné pour résumer un peu le type de musique que je fais. Le sanza c’est ce qui définit ma musique, c’est une addition de tout ce que j’aime dans la musique que ce soit hip hop, traditionnel et un peu partout en Afrique.

LR : Quel est votre parcours ? À quelle échelle êtes-vous connue ?

LZ: J’ai commencé en République centrafricaine de manière autodidacte, j’ai commencé à chanter la base. Je me suis d’abord intéressée à la danse et puis après au chant pendant mon adolescence. Avant j’étais plus dans le domaine sportif. Quand j’ai commencé la musique j’ai commencé dans le milieu hip hop : je chantais et je rappais avec un groupe qui était composé de mon frère et de mon cousin puis on a fait plusieurs scènes en République centrafricaine. Suite à cela j’ai rencontré des musiciens du groupe Yoka Souka et là je suis rentrée dans une autre dimension de la République centrafricaine. J’ai plus assisté à des concerts live, j’étais plus proche du live parce que le rap c’est beaucoup instrumental où on travaille en studio et on enregistre. J’ai commencé aussi à m’intéresser à mon patrimoine culturel, la mélodie, le rythme centrafricain etc et puis après ça j’ai pas abandonné le rap mais disons que j’ai suivi ma route en explorant cette nouvelle passion pour les rythmes issus de la République centrafricaine. De là, il y a pas mal de choses qui ont bougé pour moi. J’ai travaillé avec ces musiciens là. On a eu le soutien en République centrafricaine de lieux privilégiés pour les activités culturelles c’était pas mal l’alliance française. À côté de ça, il y avait aussi d’autres centres culturels. Il y avait pas mal de monde qui se réunissait à l’alliance française parce qu’il y avait plus de moyens aussi. Donc là j’ai fait une résidence de création avec ces mêmes musiciens, plusieurs résidences de création, plusieurs master classes de chants, initiation à la musique, au chant lyrique, à la danse contemporaine, il y avait plusieurs ateliers dont j’ai pu bénéficier. J’ai pu aussi évoluer artistiquement comme ça. Suite à cela, avec ce groupe Yoka Souka, j’ai enregistré un album. Mon premier album date de 2005. Grâce à cet album on a voyagé un petit peu en Afrique centrale, et en France aussi. On a fait un concert à New Morning, à l’alliance française de Paris. J’ai rencontré d’autres grands noms de la scène africaine. Un parcours vraiment fait de rencontres, d’addition de connaissances, d’addition d’expérience. Après cela je suis partie faire une formation en France en communication et management à l’institut de Lycée Com. De France je suis venue ici à Montréal pour des raisons personnelles. D’ici il a fallu tout reprendre artistiquement : pas de musiciens, pas de base, personne ne sait ce que tu fais. Ce qui est intéressant c’est que quand je suis arrivée, je sais pas si c’est de la chance mais j’avais déjà des titres sur Myspace et je suis arrivée en 2009 et en 2010 il y avait une recherchiste de bel et bom qui m’a appris à écouter une des chansons sur Myspace et qui m’a contacté pour que je vienne jouer à l’émission. Moi je venais d’arriver mais j’essayais déjà de voir ce qu’il se passait dans le milieu culturel montréalais et surtout afro : je suis allée voir des spectacles, j’ai rencontré des musiciens etc. Quand tu arrives tu rencontres des personnes, puis y a des amis qui m’ont mis en contact avec d’autres amis qui sont aussi dans la musique donc mon réseau amical et musical s’est tissé comme ça, à travers des présentations d’amis. Mon conjoint avait des amis ici, j’ai rencontré Julie, qui nous a présenté à Karine qui elle faisait partie d’un groupe de percussions et de danses. Entre temps j’étais aussi très curieuse et je me suis inscrite à des événements culturels avec des showcases comme celui de vision diversité. J’y ai participé et ça m’a permis de rencontrer d’autres dames. J’ai progressé artistiquement avec des scènes montréalaises.

LR :  Quels sont les défis que vous avez dû faire face dans votre vie en tant que femme artiste, et immigrante ?

LZ: Chez moi c’est différent, mais ici le défi se pose pas au niveau de la question d’être femme artiste. Le défi se pose au niveau d’arriver quelque part et de rencontrer les bonnes personnes. C’est une démarche personnelle. Moi, vu que j’étais curieuse et que j’allais vers les gens, j’ai eu moins de problèmes. Le plus gros défi ça a été de trouver des gens avec qui évoluer mais ça veut pas dire, en tant que femme, que tu trouves des personnes. Tout le monde aurait ce défi à relever. Pour moi, je ne dirai pas qu’être une femme m’a posé un problème, je n’ai pas cette perception là. Quand je suis arrivée, moi, avec mes espoirs, mes rêves et mon envie de faire quelque chose. Pour moi c’est un défi par rapport à l’environnement, l’adaptation. Je ne le présenterai pas sous cet angle là, plus en tant qu’immigrante que femme. Changement environnemental, climatique, culturel… cela a été le défi. C’est au delà du fait d’être femme. Pour moi c’est pas en tant que femme le problème. C’est si tu t’affirmes pas tu vas rencontrer des problèmes.

LR : Comment avez vous réussi à vous intégrer et à vous épanouir au Canada en tant qu’artiste ? Qu’est ce qui vous a motivée à devenir qui vous êtes ? Une figure féminine vous a t-elle inspirée ?

LZ: Je pense que déjà il faut prendre les choses simplement. Faut pas déjà se dire que j’arrive je vais avoir que des problèmes. L’ouverture c’est très important. Quand tu décides d’évoluer sur quelque chose dans un domaine c’est juste une question de temps et de travail, et de rencontrer les bonnes personnes. Moi j’ai réussi à m’intégrer parce que je suis une personne de très sociable, ouverte, je vais vers les gens. C’est comme ça que les choses se sont faites simplement. La timidité n’aurait pas beaucoup aidé et puis du fait que je suis arrivée au Québec il n’y a pas eu la barrière de la langue vu que moi je viens de République centrafricaine et que c’est francophone. Je n’ai pas eu à apprendre la langue, ce qui aurait été un défi supplémentaire. Cela a joué à mon avantage. La communication est passée plus facilement. Pour l’intégration artistique il faut faire ses preuves. Vu que moi j’avais déjà un petit parcours à l’extérieur, j’avais déjà du matériel à présenter, des choses à faire écouter, à montrer. Cela a facilité l’intégration à ce niveau là. À côté de ça j’ai cherché à me perfectionner, prendre des cours à l’Université de Montréal, des ateliers etc.

LR : Quelle est votre « motto » ?

LZ: Selon moi, il ne faut jamais laisser ce que les gens te disent t’influencer d’une trop mauvaise manière, te parasiter. Il faut vivre simplement.

LR : Des femmes artistes qui vous inspirent ?

LZ: Elles sont trop nombreuses, mais je peux en citer quelques unes. Il y a Angélique Kidjo (d’ailleurs pour une de mes premières compositions je me suis un peu inspirée d’elle), Annie-Flore Batchiellilys, Leoni Kangala, Whitney Houston.

LR : Quel conseil donneriez-vous aux femmes dans la même situation que vous, ou bien des femmes qui veulent réussir comme vous ?

LZ: Je dirais l’amour pour ce que l’on fait, ça nous pousse à aller jusqu’au bout, ainsi que la persévérance, l’ouverture et le travail.

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