Photo Emilie Azevedo
Par: Gabrielle Lemire, Cheffe Arts et culture
Le 27 Club s’est rempli jeudi dernier à l’occasion du passage de Loud dans la capitale. Avec Kimya qui assurait la première partie accompagné de DJ Skorpyon aux platines, c’était l’occasion idéale pour tous les fans du rap franco de la région de se réunir sous un même toit.
Organisé par Osheaga, rien de moins, l’événement s’est ouvert à 21h sur les paroles inspirantes de Kimya, un rappeur franco-ontarien d’origine congolaise. Au Canada depuis 14 ans, c’est un message de paix et d’amour qu’il véhicule dans ses textes. Dans Couleur, c’est un message d’acceptation des différences. Comment vous dire est quant à elle très personnelle, puisqu’elle s’adresse à sa mère, décédée très jeune. D’autres textes comme Manifeste sont à saveur plus revendicatrice.
Perspectives d’introspection
« Entre l’album et maintenant, ça a été beaucoup de remises en question, dans le sens où j’avais besoin de vivre autre chose », confie le rappeur. Après une année mouvementée depuis la sortie du EP Or et Flamme, Kimya affirme être en mode création. Son prochain album fera goûter à des rythmes africains et à des paroles en lingala, sa langue maternelle. Ça ajoutera une dimension personnelle à l’album pour le rappeur, qui s’est permis une grande introspection depuis un an.
« J’avais le sentiment que je m’étais beaucoup éloigné de mes racines, donc pour moi c’est un moment où j’avais besoin d’être plus moi-même, revenir à ma famille, créer plus de liens autour de moi », explique-t-il, ajoutant qu’il voyagera au Congo à la recherche de ses origines.
À l’avenir, Kimya ne nie pas la possibilité d’une collaboration avec Manu Militari, ancien collaborateur de DJ Skorpyon. Seul l’avenir nous dira si Militari et Kimya partageront la scène de leurs paroles revendicatrices. Au rendez-vous, un Kimya qui sortira de sa zone de confort.
Soirée Loud et claire
Après un temps d’attente qui a semblé interminable pour le public, son acolyte de longue date, Ajust, a présenté Loud sur scène. Le rappeur le plus écouté de l’année au Québec et au Canada français n’a pas déçu avec sa présence sans faille. Le public, qui connaissait le répertoire dans son intégralité, n’a pas su enterrer les paroles du rappeur, claires et précises. Impossible de sortir du 27 Club sans que les refrains sur les lèvres des spectateurs et un acouphène inévitable rappellent la soirée en compagnie de celui dont le titre Toutes les femmes savent danser tourne en radio depuis l’été. Des bouchons pour les oreilles étaient même vendus à l’entrée…
Arrogance typique du rappeur
Alors que les vues ne cessent de s’empiler depuis le lancement du clip 56k en 2017, le rappeur dégage une attitude arrogante. Un membre de son équipe le défend en expliquant que c’est un artiste sérieux très cultivé. Avec des références bibliques, historiques et même à des artistes comme Jean-Sébastien Bach dans ses textes, rien ne laisse planer le doute quant à la démarche sérieuse de l’artiste. Cependant, préférant ne pas s’entretenir avec La Rotonde, le rappeur maintient son aura de mystère.
Nous savons toutefois que l’artiste repart cette semaine à la conquête de l’Europe après un succès retentissant à Paris au printemps dernier. Ce serait par son accent québécois et son lexique bilingue qu’il aurait agi comme vent de fraîcheur pour les Français.
Scène francophone à Ottawa
Plusieurs spectateurs avec qui La Rotonde a échangé se sont dit surpris de voir autant de participation à un événement en français à Ottawa. Seul hic, les employés anglophones et la musique d’ambiance avant et après le spectacle ont brusquement rappelé au public qu’il était toujours en Ontario.
C’est ce que déplore DJ Skorpyon, pour qui la responsabilité de partager de la musique en français revient aux animateurs et aux DJ d’événements francophones comme celui de jeudi soir.
« Quand j’ai déménagé en Outaouais, j’ai réalisé que l’Ontario avait soif du français et j’ai adoré ça », explique Skorpyon, originaire de Montréal, où il faisait déjà jouer les artistes francophones. « Les personnes underground, les faire découvrir, c’est ça la job des DJ », affirme-t-il. Surtout avec le climat politique ouvertement anti-francophone dernièrement, DJ Skorpyon lance un appel à tous les autres DJ de l’Ontario d’être fiers de leur culture et de promouvoir les artistes francos.