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Par : Nonibeau Gagnon-Thibeault
Depuis quelques mois, avec les mouvements #AgressionNonDénoncée et #MeToo, des agressions sexuelles non reportées sont affichées sur la place publique. Alors que certains dénoncent le fait que ces dénonciations soient en lieu public au lieu d’être dans un tribunal, une étude nous démontre que la méfiance des femmes envers le système judiciaire est justifiée.
Réalisée par plusieurs organismes canadiens et universités, dont l’Université d’Ottawa (U d’O), cette étude souligne que seulement 21% des femmes sont satisfaites du processus entourant leur plainte. Ces dernières considèrent toutefois que cela est dû à la chance et ne feraient pas une autre plainte si jamais elles étaient encore victimes de violences sexuelles.
« Même celles qui parlent d’expériences positives ne recommenceraient pas le processus », explique Simon Lapierre, collaborateur de l’étude et professeur en Service social à l’U d’O. « Elles se sont considérées chanceuses par rapport à d’autres femmes de tomber sur par exemple un policier qui la croyait », ajoute-t-il.
Préjugés et manque d’information
Pourquoi les femmes ont-elles une perception si négative du système judiciaire par rapport aux cas de violences sexuelles ? C’est surtout dû à l’attitude des acteurs du système, notamment les policiers et procureurs, ainsi qu’au peu d’informations qui leur sont données, souligne Michèle Frenette, collaboratrice à l’étude et militante au Collectif de recherche féministe anti-violence (FemAnVi).
Les femmes vont parfois se sentir blâmées par les policiers, qui ne prennent pas en compte les besoins de la femme, mais les procureurs ont aussi leur rôle à jouer. « Quand on parle de préjugés, c’était beaucoup avec les policiers, mais aussi avec certains procureurs qui sont moins sensibilisés dans le fond à la violence ou qui vont aussi décourager les femmes de poursuivre les procédures », précise Frenette. Ces derniers auraient alors tendance à se dire « bon, on voit que tu as certaines émotions. Peut-être que tu ne seras pas capable de passer à travers le processus », déplore-t-elle.
Néanmoins, Frenette insiste sur le fait qu’un accompagnement plus soutenu des victimes par les procureurs serait nécessaire. Et ce, notamment pour les informer sur leurs droits au lieu de les décourager d’aller jusqu’au bout du processus juridique.
Des demandes raisonnables
« Ce que les femmes demandent, c’est très raisonnable en fait », explique Lapierre. « C’est d’être accompagnées par des personnes qui comprennent c’est quoi la violence faite aux femmes, par des personnes qui vont les croire, qui vont les écouter, qui vont les informer de ce que sont leurs droits, les informer sur le processus judiciaire », ajoute-t-il, tout en regrettant que ce processus ne soit pas déjà implémenté au sein du processus judiciaire canadien.
Frenette propose également que les victimes soient référées vers des ressources communautaires destinées à aider les femmes afin de les amener « vers une reprise de pouvoir ».