Entrevue littéraire : Le fleuve poétique de Nicole V. Champeau
– Par Lysane Caouette –
L’écrivaine originaire de Cornwall, Nicole V. Champeau, a bien voulu partager avec La Rotonde l’univers créatif de son tout dernier recueil de poésie, Barricades mystérieuses.
La Rotonde : Vous êtes en liste pour le Prix du livre d’Ottawa en plus d’être la lauréate du Prix Le Droit 2013 dans la catégorie poésie. Quelle a été votre réaction en apprenant que vous étiez finaliste pour le Prix du livre d’Ottawa?
Nicole V. Champeau : Ça m’a fait un très grand plaisir. Je suis heureuse de cette reconnaissance car la poésie est un style littéraire beaucoup plus difficile à apprécier.
LR : À quel moment la poésie est-elle entrée dans votre vie?
NVC : Très tôt. Adolescente, je donnais des cours de musique et de lecture. Je me suis abreuvée des grands auteurs, des classiques surtout. Ça m’a menée moi-même à la poésie. Mais ce n’était pas fait en fonction de publications, pas au début, lorsque j’étais adolescente. On n’y pensait même pas!
LR : Le fleuve Saint-Laurent semble avoir été une source d’inspiration lors de vos premières écritures en poésie. Vous vous y référez d’ailleurs à quelques moments dans votre préface. Comment ce lieu de poésie vous a-t’il inspiré?
NVC : L’eau est un lieu d’inspiration et de transformation, mais aussi une trajectoire. Car dans le fleuve, il y a un lieu de rythme et de poésie. C’est un lieu qui porte l’histoire, la géographie, mais aussi qui conserve des secrets, des mythes. L’eau est une surface sous laquelle se cachent des forces dont nous ne sommes pas forcément conscients. Pour moi, c’est un monde englouti et il me fallait aller plus loin, et surtout chercher ce qui se cachait sous la surface. C’est à partir de lieux disparus et engloutis que s’est gravée mon histoire.
LR : Comment définissez-vous la langue de la poésie?
NVC : La langue de la poésie se définie par la musicalité, le rythme, la beauté des mots, et tout ce qui porte à un désir d’aller plus loin.
LR : Comment s’est avéré le processus d’écriture de votre recueil? L’écriture de l’œuvre vous a-t-elle permis, en quelque sorte, d’explorer vos propres barricades intérieures?
NVC : Bien sûr. C’est que parfois, des barrières font obstacles. Mais souvent, lorsqu’elles s’ouvrent, elles libèrent un passage. On se retrouve donc dans une autre dimension. On entre dans une autre forme de silence et on trouve une voix qui n’appartient qu’à soi.
LR : Est-ce que vous vous attendiez à ce sentiment lorsque vous écriviez votre essai?
NVC : Pas du tout. J’ai conservé de ces moments-là un intense désir de partage. La poésie venait à ma rencontre, puisque le fleuve n’était plus le même. Je cherchais autrement que dans la connaissance, les noms, les cartes, et les textes. C’était autre chose. La poésie me donnait davantage. Une quête onirique s’amorçait, presqu’une passion de l’impossible.
LR : Quels écrivains vous inspirent énormément?
NVC : Pour Pointe Maligne et Mémoire des villages engloutis, c’est un des préludes de Claude Debussy, La cathédrale engloutie. Tout est parti de là. J’ai entendu ce prélude, je l’ai ensuite interprété, et j’ai vu cette cathédrale sortir de l’eau, un peu comme les villages engloutis des années 60.