
Entre Fierté et Francophonie : Entrevue avec Maxime Beauchamp, réalisateur franco-ontarien
Crédit visuel : Diego Lozano
Entrevue rédigée par Jacob Hotte — Journaliste
Réalisateur de multiples œuvres cinématographiques, dont Banni (Cancelled) , Watershed et Iridescence , Maxime Beauchamp est un scénariste et monteur franco-ontarien. Depuis sa jeune enfance, Beauchamp parcourt les arts de la performance à la recherche d’un média artistique avec lequel raconter ses histoires? La Rotonde s’est entretenue avec lui afin de découvrir son cheminement dans le monde du cinéma ainsi que sa formation.
La Rotonde (LR) : En tant que réalisateur, quand avez-vous découvert votre amour du cinéma ?
Maxime Beauchamp (MB) : J’ai découvert mon amour pour le cinéma beaucoup plus tard. J’étais chorégraphe et metteur en scène pendant plusieurs années ; je mettais en scène des spectacles et des courts-métrages pour présenter des numéros. C’est aussi à ce moment que j’ai réalisé que mes courts-métrages n’étaient pas très bons, techniquement. En les créant, j’ai cependant développé un intérêt pour le cinéma, ce qui m’a apporté au Vancouver Film School. C’est vraiment en œuvrant dans le domaine que j’ai pu solidifier mon amour pour le cinéma.
Le cinéma s’accorde beaucoup avec la manière dont je perçois les choses. J’avais une grande imagination visuelle et ce média m’a permis de satisfaire cela. Je ne me suis jamais vraiment dit que je voulais y faire carrière. Le cinéma et la télévision me permettent de raconter des histoires, tout en ayant beaucoup de plaisir. C’est pour cela que j’ai voulu continuer de pratiquer ce média-là.
LR : Pouvez-vous aborder plus en profondeur votre cheminement scolaire pour ceux. celles qui voudraient possiblement un jour suivre dans vos pas ?
MB : Je me suis beaucoup promené. Après la fin de mon secondaire, j’ai été étudiant pour un an au Collège Lionel-Groulx, à Sainte-Thérèse, où j’ai étudié en gestion et en techniques de scène pour devenir metteur en scène. En sortant du secondaire, j’avais une idée de ce que je voulais faire : soit travailler dans les arts et raconter des histoires. Je me suis un peu perdu en me questionnant sur mes capacités.
À la suite de cette année au Collège Lionel-Groulx, je me suis rendu à l’Université d’Ottawa, où j’ai étudié en communication et marketing, avec une mineure en théâtre. Je me disais qu’avoir un baccalauréat serait plus sûr. Le moyen d’apprentissage de l’Université ne fonctionnait pas pour moi. Je me suis donc dit que j’irais apprendre le métier de réalisateur, en le pratiquant. Je me suis inscrit au Collège La Cité, où j’ai étudié en publicité, un programme que j’ai beaucoup apprécié. Cette expérience m’a permis de réaliser que créer pour créer, c’est réjouissant, mais créer pour un public cible est ce qui fait de ce loisir, un métier.
LR : En tant que francophone de milieu minoritaire, comment est-ce que votre perception du cinéma diffère en fonction de la langue dans laquelle vous créez ?
MB : Pendant ma jeunesse, je ne visionnais pas beaucoup de contenu franco-ontarien. Cela ne m’a jamais vraiment dérangé, car je ne trouvais pas la qualité des films et les séries franco-ontariennes satisfaisantes en comparaison au reste du contenu offert à ce temps-là. Aujourd’hui, je crée beaucoup d’histoires qui incluent la Francophonie en Ontario. J’essaye de m’assurer que l’art créé en milieu minoritaire est aux mêmes standards que celui créé en milieu majoritaire, en matière de qualité.
Sur le plan de la différence entre la réalisation en anglais et la réalisation en français d’après mes expériences auprès du côté francophone, l’environnement est souvent beaucoup plus familial et j’y ai fréquemment vu davantage de passion. C’est sûrement en raison de ma proximité avec le français, car c’est ma langue maternelle. Du côté anglophone, l’environnement étant amical, mais on était davantage tourné vers la partie business du cinéma. En revanche, je trouve qu’il est plus possible pour moi d’être précis en anglais. À mon avis, les mots sont plus directs et moins complexes que la majorité des mots en français. Au final, j’ai donc tendance à alterner entre les deux langues quand je réalise.
LR : En tant que personne LGBTQ+, comment est-ce que cette partie de votre identité se manifeste dans vos œuvres ?
MB : Quand j’ai fait mon « coming out », au début de ma vingtaine, l’une de mes plus grandes inquiétudes portait sur la perception des autres lorsque je me présentais. Je ne souhaitais pas que l’entièreté de ma personnalité soit définie par le fait que je sois gay. En tant que réalisateur, créer m’a permis de percevoir ma marginalité comme étant quelque chose de puissant. Je vois le monde de manière différente et cela donne une certaine unicité à mes histoires. Aujourd’hui, je raconte plusieurs histoires LGBTQ+, pas avec l’intention d’être revendicateur, mais plutôt pour tenter de démontrer un point de vue unique sur la vie.
LR : Vous venez tout juste de conclure le tournage de votre nouvelle série FEM, qui apparaîtra sur Unis TV, l’hiver prochain. À quoi pouvons-nous nous attendre de cette œuvre?
MB : En tant que show runner et créateur de l’idée derrière la série, c’est ma responsabilité de conserver la vision jusqu’à la fin. J’ai appliqué toutes les connaissances et les expériences acquises au cours des années dans ce projet. C’est un drame musical qui s’inspire de vidéo-clips et qui incorpore de la danse, deux éléments qui me sont familiers. J’ai aussi contribué au côté LGBTQ+ et franco-ontarien de la série, étant donné que l’histoire prend place dans une petite ville francophone, en Ontario.
Les gens peuvent s’attendre à des moments de sensibilité, mais aussi de joie et d’euphorie. Que ce soit dans le style ou dans les émotions du personnage, la série contestera potentiellement les perspectives et les opinions de certaines personnes. Il ne faut pas avoir peur ni hésiter à s’engager dans une conversation. C’est tout ce qui compte. Comparativement à mes autres œuvres, il y a eu une plus grande diversité de gens qui s’y sont impliqués, et donc une plus grande variété d’opinions. Il y a aussi différentes approches qui ont été incorporées dans la série et qui rendent cette dernière plus complète.