Labyrinthes
Par Frédérique Champagne
EN REGARDANT LES ÉTOILES
29 janvier 1990
En regardant les étoiles
I don’t understand…
Nothing
At all
Sur mon visage, la pluie, les larmes
La douleur
Mon visage qui a mal contre ton chandail
Poings serrés sur le Soir
Pourquoi? Pourquoi?
WHY!
Chanter au boutte
L’Exil
Longs coups de couteaux dans ma mémoire
En blanc
Sanglots arrachés à la Lune
Je ne m’accroche à rien
Envolé, mon destin
« Tu me voles mon pays »[1]
Tu m’arraches à mon âme
Tu m’enlèves à mon Histoire
Toujours du mauvais côté de la rivière, du miroir
Pourquoi?
Pourquoi?
À l’intérieur de moi, la déchirure solitude
Orages dans le ciel, le Québec trop loin
Qui m’abandonne
Roulée en boule sur le trottoir
Toute seule! Toute seule!
Entre deux rues cimetière
Mon nom sur l’échafaud offert aux astres
De l’intolérance, du racisme,
De la francophobie
Mon accent parti
Je n’ai jamais existée
Je l’ai su hier
Rayée de l’Humanité
La Conquête terminée en moi
Dernière franco-ontarienne de ma ville
Râle, râle, mon pays
Pourquoi frapper le silence encore et encore de ma Parole
Pourquoi j’existe?
Sur tous les journaux
Sault-Sainte-Marie officiellement unilingue anglaise
Trahie par la mairie, le firmament
En regardant les étoiles
Ce soir
Je me tais
Et je la sens
Moi, l’assimilée du Temps
Pour la première fois
Agrippée au ciment, au givre
À moi
Now
Contre ma bouche fleur de lys
L’AGONIE,
MA LANGUE QUI MEURT,
MA PEUR
[1] HARMONIUM, « L’EXIL »