Inscrire un terme

Retour
Actualités

Elsipogtog : Indignation à Ottawa

21 octobre 2013

– Par Hamdi Souissi –

Le 17 octobre dernier, grâce à une mobilisation  rapide sur les réseaux sociaux, environ 200 personnes se sont rassemblées non seulement pour démontrer leur soutien à la lutte menée au Nouveau-Brunswick par la nation Elsipogtog contre la destruction de leurs territoires, mais aussi pour exprimer leur indignation face aux agissements de la GRC.

Depuis plusieurs mois, les membres de la nation Elsipogtog ne s’entendent pas avec le gouvernement néo-brunswickois  qui tente de développer l’exploitation des gaz de schiste. Suite à une injonction juridique au profit de l’entreprise détentrice du permis d’exploitation, SWN Resources, la GRC est intervenue de façon musclée pour évacuer la zone de prospection consentie à l’entreprise. Suite à cette intervention, les tensions ont vite grimpé, menant à des scènes d’agents en tenue de combat, de balles en caoutchouc, de gaz lacrymogène et d’auto-patrouilles incendiées. Une quarantaine de personnes ont été arrêtées.

 

Une marche et un rassemblement

Tout cela a suscité colère et exaspération ici même à Ottawa : « J’ai participé à plusieurs manifestations dans la dernière année, et j’en ai assez! Le plus frustrant aujourd’hui c’est que des femmes enceintes, des enfants sont en état de danger! Encore plus frustrant, James Anaya, le rapporteur spécial des Nations-unies sur les droits des peuples autochtones, était ici. Il a critiqué la situation et le traitement fait aux Autochtones, et voici la réponse du gouvernement Harper! », a lancé Liz Stein, une des organisatrices de la manifestation. « Je suis frustrée et impuissante, qu’est-ce que je peux faire! Après toutes ces manifestations, ils continuent à s’en prendre à la communauté, c’est désespérant! Ce soir, je m’assieds ici, je passe la nuit ici, la GRC peut m’arrêter, ça m’est égal! », a-t-elle rajouté.

Un premier groupe s’était rassemblé au monument des droits humains. Claudette Commanda, membre de la communauté de Kitigan Zibi et professeure en études autochtones à l’Université d’Ottawa (U d’O) y est allée d’un témoignage chargé d’émotions : « Nos ancêtres ont pris soin de cette terre pour leurs enfants. Nous sommes ces enfants et nous devons protéger cette terre car d’autres enfants vont en hériter. ». Le groupe, au rythme des tambours et des chants traditionnels, a rejoint, sous une importante escorte policière (comprenant des agents infiltrés de la GRC), une foule plus importante sur la colline du Parlement. Pendant la marche, Mme Commanda a ajouté : « Je suis ici pour mes frères et sœurs micmacs, pour leur exprimer ma solidarité. Ils sont victimes d’une violence injuste qui doit cesser. Ils ont le droit de protéger leurs terres pour leurs enfants et petits-enfants. C’est une violence perpétrée contre ce peuple par les corporations, les tribunaux et les autorités. C’est une violence coloniale! ».

 

Étudiants, Autochtones, même combat?

Le rassemblement s’est poursuivi même après le coucher du soleil et fut ponctué de témoignages, de danses, de prières et de chansons. L’ambiance était au recueillement et à la solidarité. « Ce soir, je suis venu ici pour démontrer mon soutien à la communauté micmac au Nouveau-Brunswick qui est aujourd’hui confrontée à une action musclée de la GRC, qui protège les droits d’une entreprise plutôt que ceux de la communauté et de l’environnement. », a confié Daniel Cayley-Daoust. Certaines personnes présentes nous ont partagé leur analyse de la situation, notamment Eugénie Boudreau, étudiante à l’U d’O : « Je suis originaire du Nouveau-Brunswick, pas très loin du territoire elsipogtog. Ça fait longtemps, depuis que tout ça a commencé, que je suis le débat sur le gaz de schiste. C’est incroyable ce que le gouvernement essaie de faire passer à la population. Ça fait trois ans que le Premier ministre Howard parle d’écouter l’avis de la population sur l’exploitation des ressources naturelles, et il y a un mouvement important d’opposition aux gaz de schiste, et malgré cela, le gouvernement continue d’accorder des permis d’exploitation. Les Micmacs tentent de proposer des solutions pour partager la terre entre les différentes communautés. Et la réponse du gouvernement aujourd’hui est juste inacceptable, d’avoir amené des centaines de policiers, des snipers, des tenues de camouflage, etc., c’est révoltant. ».

Il y avait d’ailleurs une importante présence d’étudiants sur les lieux. On a pu reconnaître Nicole Desnoyers, vice-présidente aux affaires de l’équité : « Je suis ici en tant que femme métisse, que femme autochtone, afin de démontrer ma solidarité avec mes cousins micmacs qui se font attaquer au Nouveau-Brunswick. Je suis ici également pour assurer une présence étudiante et signifier que les étudiants de l’U d’O sont en solidarité avec les luttes autochtones à travers le Canada. ».

L’année passée, les actualités, locale et nationale, furent marquées par le mouvement Idle No More et c’est à se demander si les évènements des derniers jours ne vont pas relancer tout cela. C’est ce que croit M. Cayley-Daoust : « La résistance de la communauté devrait continuer. Ce qui est arrivé aujourd’hui devrait avoir un effet mobilisateur pour l’ensemble des luttes autochtones à travers le Canada. Et c’est déjà le cas. Ce n’est pas uniquement au Nouveau-Brunswick que le gouvernement Harper pousse à l’exploitation des ressources naturelles, particulièrement sur les territoires autochtones. ».

Inscrivez-vous à La Rotonde gratuitement !

S'inscrire