– Par Hamdi Souissi –
Durant l’année universitaire 2007 -2008, l’Université d’Ottawa (U d’O) a engagé une étudiante et employée du Fulcrum, Maureen Robinson, pour surveiller Denis Rancourt et certains étudiants. Rappelons que c’est cette année-là que M. Rancourt a été suspendu de ses fonctions. Dans un courriel daté du 4 juin 2007, Michelle Flaherty, conseillère juridique de l’U d’O au moment des faits, contacte Robert Major, alors vice-recteur aux études, pour l’informer qu’elle a trouvé une étudiante « pour [les] aider dans l’affaire Rancourt ». Le 30 août 2007, le doyen de la Faculté des sciences, André Lalonde, contactait Mme Robinson pour lui offrir un emploi. Dans sa réponse, Mme Robinson mentionne un ressentiment personnel envers un professeur de la Faculté des sciences qui serait condescendant envers les étudiants non-activistes. Ce professeur n’étant nul autre que Denis Rancourt. À partir de ce moment, Mme Robinson entreprendra une surveillance des activités de M. Rancourt pour le compte de l’U d’O: cours, conférences, émissions de radio, activités parascolaires, etc. Elle assurera également une surveillance des étudiants gravitant autour de M. Rancourt ou politiquement actifs. Dans une série de courriels allant de janvier à mars 2008, Mme Robinson partagera régulièrement ses observations avec Mme Flaherty et certains membres de l’administration.
En novembre 2009, suite à une demande d’accès à l’information, M. Rancourt obtient la confirmation que l’U d’O opérait une surveillance de ses activités et décide d’envoyer un grief aux services des ressources humaines de l’U d’O. L’affaire sera portée devant la Commission des relations de travail de l’Ontario (CRTO). Une partie des activités de Mme Robinson se faisait sous le faux nom de Nathalie Page. Notamment sur les réseaux sociaux. Lors des comparutions devant la CRTO, M. Lalonde a reconnu avoir eu accès à ce faux compte à la demande de Mme Robinson. M. Lalonde ajoutera qu’il désapprouvait l’idée de surveiller ainsi M. Rancourt et qu’il a même tenté de décourager Mme Robinson, mais cette dernière aurait insisté par intérêt personnel. Dans ce contexte, il acceptait de recevoir les informations qu’elle lui faisait parvenir. M. Lalonde reconnaîtra également avoir demandé conseil à un psychiatre, car il était inquiet de l’état de santé mentale de M. Rancourt, surtout que ce dernier avait accès à des matériaux radioactifs dans son laboratoire avant l’ordre de fermeture. Les informations de Mme Robinson lui servaient donc à évaluer la situation et le danger potentiel qu’était M. Rancourt et son entourage. Les comparutions devraient reprendre en mai 2013.
Dans la même affaire, le 27 janvier 2010, le Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 2626 (SCFP 2626) a décidé de poursuivre l’U d’O, puisque certains de ses membres, qui entretenaient des relations avec M. Rancourt, ont également été sous surveillance. En octobre 2010, SCFP 2626 rapportait qu’une entente avait été signée avec l’U d’O et que la plainte avait été abandonnée. L’entente garantissait qu’aucune information collectée sur un employé ne figurerait à son dossier. Au moment de l’entente, l’U d’O niait les allégations de surveillance. M. Rancourt et certains étudiants ont exprimé leur désaccord avec l’entente, car elle contribuerait à légitimer la surveillance des étudiants et professeurs.
En ce qui concerne Mme Robinson, nous n’avons pas été en mesure de la retracer. Notre piste s’arrête à 2010 alors qu’elle aurait déménagé en Australie pour étudier à l’Université d’Adélaïde. Mme Flaherty a pour sa part quitté ses fonctions à l’U d’O et est désormais membre du Tribunal des droits de la personne de l’Ontario. Finalement, M. Lalonde a été emporté par le cancer en décembre dernier.
L’U d’O, comme pour toute affaire en cours concernant M. Rancourt, a refusé de faire le moindre commentaire ou de nous accorder une entrevue.