– Par Ducakis Désinat –
L’automne frappe à notre porte, voilà que les hommes s’agitent de nouveau. Il est toujours fascinant de remarquer comment le cirque des activités humaines se met en branle au même moment que celui de la nature se décline. Pendant que cette dernière se prépare tranquillement à ralentir ses activités, les hommes prennent le chemin inverse, ils sortent de leur trou et revêtent leurs beaux accoutrements pour se vaquer à toutes sortes d’activités dans le but plus ou moins avoué de justifier leur petite existence. Ce que l’On désigne par rentrée automnale n’est que le début de ce cirque macabre. Bien plus, que les autres, c’est l’activité politique qui a tendance d’occuper l’espace médiatique. Par peur d’avoir sombré dans l’oubli durant la période estivale, en septembre, le député, le premier ministre, le conseiller municipal n’hésite pas à s’afficher sur les différentes plateformes médiatiques misent à sa disposition pour galvauder les grandes propositions qu’il a mijotées l’été entre deux épluchettes de blé d’inde. En ce bel automne de 2013, on assiste, au Québec, à un feuilleton du genre qui prend des proportions vaudevillesques. Je parle bien évidemment de la « Charte des valeurs québécoises » concoctée par le gouvernement actuel du Québec sous l’égide Pauline Marois, mettant en vedette Bernard Drainville et la panoplie de sous-ministres et de députés au service de la bonne cause. Rajoutez à cela les médias dits traditionnels et le grand 2.0, la distribution est complète, il ne reste plus qu’à sortir le popcorn. Détrompez-vous, je n’ai nullement l’intention de vous entretenir sur les tenants et aboutissements de ce projet, je crois que tout a été dit et répété avant même que le ministre dépose la « Charte ». Mon but est plutôt d’attirer l’attention du lecteur sur ce qui se trame réellement derrière toutes ces agitations. Il suffit de faire abstraction de toute la théâtralité pour s’apercevoir que la politique, le sport, le travail, la reproduction sont le fruit d’un principe fondamental; les hommes, peu importe leur rang social ou l’estime qu’ils peuvent avoir d’eux-mêmes, ont une peur farouche de l’ennui. Alors, pour échapper à cette condition inhérente à l’existence, ils s’inventent une panoplie de loisirs auxquels ils attribuent le plus souvent un caractère officiel ou sacré pour en justifier la pratique. Mais, toutes ces agitations, peu importe sur la forme qu’elles se présentent, sont motivées par ce principe : « Se lever le matin pour avoir une bonne raison de se coucher le soir ». Malgré que tout le sérieux que les hommes politiques s’appliquent à l’exercice de leur fonction, ils n’échappent pas à ce simple principe. Parfois, il arrive qu’un homme d’état se croit investi d’une mission suprême et semble vouloir inscrire son activité dans un registre plus grand que son simple mandat, comme c’est le cas avec cette fameuse charte qui nous pend au nez. Par la position rigide qu’affiche le gouvernement, le faciès confus empreint d’anxiété qu’affiche le ministre Drainville lorsqu’il tente de justifier le bien-fondé de sa charte, on peut qu’extasier devant la qualité du divertissement qui nous est offert à notre époque. On n’a rien à envier au cirque romain. Cependant, c’est en suivant le débat post-charte que le simple divertissement fait place à grande comédie humaine. On se divise en deux camps, les frustrés sociaux versus les bien-pensants et les rôles s’inversent selon qu’on se dit pour ou contre, par la suite, on s’arrose d’arguments à la volée et tout d’un coup l’homme ordinaire se transforme en politologue, juriste ou sociologue pour la cause. Mais tout cela n’est que poudre aux yeux car plus on s’accroche aux kippas, turbans, crucifix et autres symboles religieux, on s’éloigne des enjeux pour un gouvernant aujourd’hui, soit de garder le système aussi propre et bien huilé que nous l’avons laissé à notre entrée et tout ce qui par excès tente de outrepasser ce rôle fini par créer une cacophonie inutile. En effet, il y’a longtemps que le politique dans sa nature actuelle a perdu toute capacité de d’amélioration de la condition humaine puisque les acteurs sont pris dans une machine qui les dépasse. De sorte que rien ne va au-delà de la prochaine élection, la stratégie prime sur les idées. En fin de compte, ce n’est plus le cynisme qui recouvre la chose politique, nous ressentons de plus en plus l’odeur de sa putréfaction. Elle suinte nos écrans.