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Par : Nonibeau Gagnon-Thibeault – Journaliste
Une foule d’approximativement 500 personnes était présente à l’Assemblée générale (AG) de la Fédération étudiante de l’Université d’Ottawa (FÉUO) le 13 mars dernier. La plupart des personnes se sont mobilisées à l’Auditorium des anciens afin de voter sur une motion proposant l’adhésion de la FÉUO au mouvement BDS (Boycott, désinvestissement et sanctions) qui s’oppose « au projet colonisateur d’Israël en terre palestinienne ».
Une mobilisation qui a surpris la FÉUO
Ne s’attendant pas à autant de participant.e.s, la FÉUO a tenu une AG qui était simultanément tenue à l’Auditorium des anciens et à l’agora du Centre universitaire. « On est le double ou le triple de ce qu’on attendait », avait annoncé aux étudiant.e.s le président de la FÉUO, Hadi Wess.
Beaucoup d’étudiant.e.s se sont mobilisés afin de se prononcer sur une motion demandant à ce « que la FÉUO soutienne les campagnes associées au mouvement BDS, y compris la campagne de désinvestissement de corporations complices à l’occupation des territoires palestiniens, et ce jusqu’à ce qu’Israël respecte le droit international et les droits du peuple palestinien ».
Un étudiant en médecine, s’exprimant sous le couvert de l’anonymat, explique être venu à l’AG pour supporter le mouvement BDS. « Je suis venu ici parce que c’est important de se tenir debout contre les gouvernements qui oppressent des peuples », affirme-t-il en estimant qu’« Israël commet des actes horribles contre les Palestiniens et on doit faire pression pour changer ça ».
Une motion antisémite ?
Lors du débat précédant le vote de cette motion, un étudiant juif a affirmé que « BDS engendre l’antisémitisme ». Il a dit ne pas se sentir en sécurité sur le campus parce que sa kippa fait de lui une minorité visible et que cela lui fait régulièrement subir des commentaires antisémites. Pour lui, l’adoption de BDS ne fait que renforcer l’attitude antisémite sur le campus.
« BDS n’est pas antisémite », a affirmé une autre étudiante juive, tandis qu’une troisième personne a ajouté que le mouvement BDS est pour le respect des droits humains et du droit international et que le mouvement s’oppose à l’antisémitisme.
Une étudiante a demandé à ses camarades de voter contre la motion BDS puisque selon elle cela empêche la compréhension entre les deux partis du conflit international. « Par exemple, le mouvement BDS demande le boycott des institutions académiques israéliennes. Cela signifie de refuser dans notre campus des professeurs israéliens » explique cette dernière, et ce « même s’ils sont critiques des actions de l’État d’Israël. […] C’est totalement en contradiction avec la liberté académique ».
Confusion constitutionnelle
Après le vote, il fut annoncé en premier lieu que la motion endossant le mouvement BDS avait gagné avec une majorité simple et qu’elle avait donc été adoptée par l’Assemblée. Cela a suscité des cris de joie et des applaudissements d’étudiant.e.s soutenant la motion. Puisqu’il était formellement interdit de crier, applaudir, rire et fixer des yeux lors de l’Assemblée, de nombreuses personnes ont été expulsées de l’auditorium.
Immédiatement après cela, un étudiant a demandé s’il ne fallait pas plutôt le deux-tiers (2/3) des votes en faveur de la motion pour que celle-ci soit adoptée compte tenu de sa nature visant à altérer la constitution. La présidente de l’Assemblée, Bilan Arte, a revu la motion et a affirmé qu’il fallait en effet le 2/3 des votes. Puisque les votes en faveur de la motion furent majoritaires, mais n’atteignaient pas le montant requis des votes, la motion fut finalement rejetée par l’Assemblée.
Après cette annonce, la majorité des étudiant.e.s a quitté l’Assemblée, réduisant le nombre de participants au point de perdre quorum et de clôturer l’AG.
Des décisions qui ne changent rien
Plusieurs étudiant.e.s contre la motion BDS ont bruyamment célébré la victoire de leur camp devant l’auditorium. Ils pourraient célébrer trop vite, car les décisions prises à l’AG ne changent en rien la Constitution de la FÉUO. C’est le Conseil d’administration, constitué des élus de la FÉUO, qui aura le réel pouvoir décisionnel et votera sur les motions de l’AG.
Une motion assurant un processus électoral indépendant
Avant cela, la première motion de l’AG à être débattue proposait d’engager un parti tiers pour organiser les prochaines élections de la FÉUO, ainsi que d’instaurer le vote en ligne. Elle a été déposée dans un contexte où l’indépendance du processus électoral par rapport à l’équipe exécutive a été remise en question, notamment en ce qui concerne l’authenticité des résultats de la dernière élection. Les étudiant.e.s ont massivement voté en faveur de la motion.