Par: Gabrielle Lemire, Cheffe Arts et culture
La ville d’Ottawa est réputée pour son attitude beaucoup plus calme et conservatrice que d’autres villes plus pétillantes comme Montréal. Toutefois, sa scène artistique gagne à être connue, tout particulièrement les artistes locaux qui profitent des soirées Open Mic(scène ouverte) pour tenter de percer. La Rotonde vous donne un aperçu de la scène ouverte du LIVE on Elgin et à celle du Café Nostalgica sur le campus.
Open Mic au LIVE on Elgin
Le LIVE on Elgin, configuré comme une boîte noire, sert d’espace pour les performances théâtrales et d’humour. Puisque l’espace est avant tout un espace scénique et non un bar, la salle de spectacle crée une ambiance très différente de celle d’un commerce où la fonction première est la vente de boissons, tels que les autres endroits offrant des scènes ouvertes dans la ville d’Ottawa.
Les performances de mardi soir étaient d’une grande variété. On pouvait autant y voir une interprète chanter en mandarin en s’accompagnant au piano qu’un slameur sollicitant la participation d’autres artistes pour créer une ambiance musicale improvisée. « Ici, le public vient pour voir de l’art, quelque chose qui se démarque », explique l’animateur du Open Mic, Joel Elliott, connu sous le nom de scène Jumpin’ Joel Flash.
« Les gens se pointent de bonne heure et font une file pour écrire leur nom sur la liste parce que tout le monde veut avoir une place. C’est un Open Mic qui a une très bonne réputation d’écoute, de diversité », renchérit Vincent Lévesque, diplômé de l’Université Carleton en composition. Les performances variées de niveau professionnel sortent souvent de l’ordinaire, pour le bonheur d’un public ouvert d’esprit qui apprécie l’art à sa juste valeur. Cet environnement positif permet alors une soirée où tous sont les bienvenus.
« Il n’y a vraiment aucune négativité. Tout le monde se motive l’un l’autre. Que l’artiste soit là pour la première fois ou que ce soit un pro ou l’artiste mis en valeur cette semaine, tout le monde reçoit le même montant d’applaudissements à la fin », ajoute Flash. Chaque semaine, en plus des artistes amateurs, un artiste invité vient jouer pendant trente minutes à la mi-temps de la soirée.
Sentiment de communauté
Flash explique qu’une communauté s’est créée grâce à l’événement hebdomadaire qui se déroule chaque mardi à 2oh. Celui-ci prête même sa guitare aux artistes qui n’ont pas la chance d’apporter la leur sur place. Les artistes ont accès à plusieurs micros et à un piano acoustique de qualité, toujours sur place. Ceux qui chantent sans jouer d’instrument peuvent emmener une bande audio. « Tout le monde est tellement accueillant, c’est incroyable. Ça commence avec la musique et un moment donné, ça arrête d’être par rapport à la musique et ça devient un lieu de rencontre entre nous », explique Nathan Dufresne, un auteur-compositeur-interprète originaire de London, où le milieu musical est beaucoup plus individuel et compétitif.
« C’est ici que j’ai le plus grandi. C’est comme une chenille qui s’est transformée en papillon grâce à cette scène-ci », partage Winnie Julot, une auteure-compositeure-interprète qui lancera son premier EP au cours du mois.
Ce même sentiment de communauté est ressenti les jeudi soirs dans une autre soirée scène ouverte, dans un lieu situé sur le campus de l’Université : le Café Nostalgica.
Scène ouverte au Café Nostalgica
Chaque jeudi soir à 20h30 sonne le début des inscriptions à la scène ouverte du Café Nostalgica, animée depuis trois ans par Amanda Lowe Warnakulasuriya, étudiante de psychologie et biologie à l’Université d’Ottawa. Après avoir exploré les scènes ouvertes partout à Ottawa depuis 2012, celle-ci travaille maintenant à développer des espaces sécuritaires pour les artistes ayant un handicap ou appartenant à des minorités sexuelles.
« On est le seul endroit où la scène ouverte est complètement accessible. Que ce soit pour les chaises roulantes, les marchettes. On a une salle de bain accessible avec un ascenseur, une barre pour se tenir. C’est une salle de bain unisexe aussi. Les gens non-binaires ont aussi le choix de quelle salle de bain utiliser », explique l’animatrice.
Les performances de style slam semblent être plus populaires que les performances musicales au Café Nostalgica. Malgré le nombre assez limité d’artistes jeudi soir dernier, la scène ouverte du Café Nostalgica semblait en effet être un environnement encore plus inclusif que celui du LIVE on Elgin, où il faut monter un escalier pour atteindre la salle.
Même si le Café Nostalgica est géré par l’Association des étudiants diplômés de l’Université d’Ottawa (GSAÉD), ce ne sont pas que les étudiants qui y ont accès; les membres de la communauté sont aussi les bienvenus lors des scènes ouvertes.
C’est le cas d’Oakley Kiss, une personne non-binaire handicapée qui s’exprime à travers la performance poétique de style slam et à travers l’art abstrait. « J’aime ça ici, parce que malheureusement, c’est le seul endroit où je peux me déplacer de façon indépendante en plus de pouvoir performer et de faire partie de la communauté ». L’artiste, qui a d’ailleurs fait ses débuts au Café Nostalgica, souligne la réaction toujours ouverte d’esprit du public du Café, où une communauté s’est créée entre les groupes qui reviennent chaque semaine pour performer.
L’animation d’Amanda Lowe Warnakulasuriya est également complètement bilingue pour rejoindre les étudiants francophones autant qu’anglophones.