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Chronique philo : Déconstruire l’automobile

24 novembre 2014

– Par Marc-André Bonneau –

Votre char est-il un objet déshumanisant? En 1973, le penseur d’origine autrichienne Ivan Illich doutait de l’efficacité de l’automobile par le biais d’un calcul relativement simple : le temps nécessaire à l’achat du véhicule et les frais associés à son usage, additionnés au temps lié à la construction des routes, font-ils de l’automobile un objet productif? À ce calcul s’ajoute une étendue de coûts environnementaux qu’implique l’automobile, tels que la pollution de l’air et l’obésité. Selon Illich, la voiture est contre-productive.

En 1973, le penseur estimait qu’elle se déplace à une vitesse moyenne de six kilomètres/heure.  Pour utiliser son vocabulaire, l’automobile n’est pas « conviviale ».

Ce manque de convivialité s’explique aussi par les connaissances nécessaires à ce que l’utilisateur soit vraiment maître de sa voiture. Si l’usager ignore comment la déboulonner proprement et s’il ne peut l’utiliser indépendamment, le conducteur a des options limitées lorsqu’il fait face à un bris.
Pour sauver tout le temps sacrifié en acquérant l’objet, pour regagner la liberté investie, l’automobiliste devra avoir confiance dans l’industrie automobile.

Le conducteur encouragera la vente de pièces de rechange. Du même coup, la construction de nouvelles autoroutes. Sommes toutes, plus d’arguments pour perpétuer un système déjà brisé : l’industrie s’exclame jamais en disant « plus de temps libre pour tous! » et tend généralement à vouloir maximiser ses profits.
La déshumanisation, j’estime, pourrait bien intervenir à ce point où l’individu est amené à sacrifier sa liberté, autrement dit, sa force de travail, pour acheter une voiture qui alimente son aliénation. Le futur automobiliste fait face à un système qui compte des infrastructures, des lois, des normes sociales et tout ce qu’il faut pour avoir une voiture et l’apprécier.

L’hypothèse est la suivante : la collectivité se retrouverait gagnante à intégrer un objet plus « convivial » dans ce système. Ce serait aussi un objet plus productif, car on peut aussi produire des loisirs, de l’art et tout ce qui nous plaît.

Or, parmi ce qui n’a pas été chevauché dans l’assemblage de raccourcis que constitue cette chronique, c’est l’idée que l’automobile nous plaît. La vitesse, l’impression de liberté et bien d’autres facteurs.

Rajoutons un peu de physique à cet amalgame d’idées. Plus on se déplace rapidement, moins d’informations l’œil humain peut percevoir à un moment précis. Le paysage est beaucoup plus vaste lorsqu’on marche que lorsqu’on roule à grande vitesse. L’étendue des choses qui nous entourent s’agrandit, et le déplacement ne se limite plus à rejoindre la destination prédéterminée. Peut-être serait-il le temps de lever la pédale?

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