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Boycotter pour soutenir le peuple palestinien

Crédit visuel : Camille Cottais — Rédactrice en chef

Article rédigé par Hai Huong Le Vu — Journaliste

Le 4 mai dernier, le Syndicat étudiant de l’Université d’Ottawa (SÉUO) a publié une déclaration sur sa page Instagram incitant l’administration uottavienne à désinvestir des organisations qui encouragent l’occupation et la violence en Palestine. Cet appel s’inscrit dans le mouvement Boycott, Divestment, Sanctions (B.D.S), mais de quoi s’agit-il exactement ? 

Emily Regan Wills, professeure en science politique à l’Université d’Ottawa (U d’O) et spécialiste du Moyen-Orient, explique que l’initiative B.D.S. est un appel au boycott des produits israéliens, à la suspension des investissements dans les organisations israéliennes ou les entreprises collaborant avec celles-ci, et à l’imposition de sanctions contre ces dernières.

Bruce Katz est le représentant de l’organisation Palestiniens et Juifs unis (PAJU), qui vise à défendre les droits humains, soutient l’existence nationale palestinienne et promeut la paix au Moyen-Orient. En entrevue avec La Rotonde, il explique que l’initiative B.D.S a débuté en 2005 comme mouvement de boycottage à l’échelle mondiale, afin de condamner le gouvernement israélien.

Depuis plusieurs semaines, devant le pavillon Tabaret, le club Integrity Not Spite Against Falastin (INSAF), dirigé par Sumayya Kheireddine, fait partie des organisateurs d’un campement qui incite l’administration de l’U d’O à désinvestir des entreprises impliquées dans le génocide palestinien. Selon la présidente de ce mouvement, le B.D.S est « une protestation pacifique qui permet à tou.te.s […] d’aider les Palestinien.ne.s d’une manière tout à fait légale ».

Pourquoi boycotter, désinvestir et sanctionner ?

Kheireddine affirme que la Banque Scotia a fortement investi dans Elbit, une entreprise de production de drones qui, selon Katz, ont été utilisés pour perpétrer un génocide contre les Palestinien.ne.s à Gaza. Il ajoute que cette institution est le plus grand investisseur étranger dans cette compagnie : elle lui a versé plus de 700 millions de dollars canadiens. La leader indique que cette banque a réduit de moitié son investissement dans Elbit à la fin du mois de mars 2024.

La présidente de l’INSAF est persuadée que, quelle que soit la taille d’une compagnie, celle-ci doit être ciblée si elle est impliquée dans un génocide. « Les entreprises sont conscientes de leurs actes et ont la capacité de modifier leur comportement », développe-t-elle.

Regan Wills ajoute qu’il ne s’agit pas uniquement d’une question de choix personnel. Selon elle, l’ampleur du mouvement B.D.S. peut pousser les entreprises qui facilitent le génocide palestinien à changer leurs activités ou leurs investissements.

La jeunesse comme moteur du mouvement

Le représentant de PAJU se réjouit du nombre croissant de jeunes qui adhèrent à la campagne B.D.S. et qui dénoncent ce qu’il nomme « l’hypocrisie des dirigeant.e.s universitaires ».

Katz constate que la jeunesse canadienne pointe également du doigt l’ignorance des élu.e.s envers les injustices vécues par le peuple palestinien. Selon lui, ceci s’explique par le fait que les politicien.ne.s sont dicté.e.s par les intérêts politiques et économiques de l’Occident. « Le Canada n’est pas innocent, il est complètement mêlé à cette situation », juge le représentant.

Kheireddine indique que certains États américains considèrent le mouvement B.D.S. comme étant illégal. Elle ajoute que ce mouvement est souvent mal perçu et mal compris : beaucoup croient à tort qu’il s’agit d’antisémitisme, alors qu’il s’agit plutôt d’un mouvement antisioniste. La présidente précise que le mouvement B.D.S. critique les meurtres d’innocent.e.s, et non pas une religion.

Au-delà du boycott

Kheireddine affirme qu’elle n’attend pas que quelqu’un aille au-delà de ses moyens pour boycotter. Selon elle, si une personne achète un produit d’une entreprise boycottée parce que c’est la seule option qui lui est offerte, il ne faudrait pas la critiquer.

La présidente de l’INSAF poursuit en soulignant que la plupart des entreprises qui investissent massivement dans l’occupation israélienne sont également très présentes dans l’industrie des énergies fossiles. Selon elle, cela nous amène à réfléchir sur le consumérisme et le capitalisme. Elle incite ainsi à examiner ses habitudes, à privilégier les petites entreprises et à moins consommer.

La jeune leader renchérit en encourageant le public à diffuser de l’information sur les réseaux sociaux. « Il ne s’agit donc pas seulement d’acheter ou de ne pas acheter, mais aussi de relancer les conversations », avance-t-elle. Les discussions, à ses yeux, font partie des éléments importants des protestations pacifiques.

En réponse aux appels au désinvestissement dirigés envers l’Université, le 5 juin dernier, Jacques Beauvais, provost et vice-recteur aux affaires académiques de l’U d’O, a déclaré à la communauté uottavienne que l’Université investit de manière « responsable », et que leurs propositions aux responsables du campement ont été refusées. Ces derniers ont en retour critiqué ce message comme manquant notamment de transparence et d’honnêteté.

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