Illustration Andrey Gosse
Par: Gabrielle Lemire, cheffe du pupitre actualités
Moi qui croyais que l’habitude de communiquer avec Doug Ford sur son téléphone cellulaire avait été laissée en 2018… Eh bien non, au détriment des avancements dans le dossier franco-ontarien et de la crédibilité de notre Premier ministre, il semblerait que d’envoyer des textos à notre dirigeant relève encore de la norme.
Il faut dire que le Premier ministre avait lui-même invité les citoyens à faire usage de ce moyen de communication en début de mandat. Par contre, celui qui travaille « pour le peuple » et qui se dit à l’écoute des Ontariens serait plutôt un adepte de l’écoute sélective. En effet, vous ne serez pas surpris d’apprendre que cette technique inusitée relève d’un populisme qu’on peut sentir à des kilomètres à la ronde, un hameçon auquel les citoyens semblent mordre volontiers.
Rappelons-nous que suite à l’annonce des coupures du gouvernement progressiste-conservateur en novembre dernier, on pouvait lire dans un article de Radio-Canada l’expérience de jeunes Franco-ontariens ayant contacté Ford sur son cellulaire. À leur grande surprise, celui-ci avait répondu et avait prêté une oreille semi-attentive à leurs questionnements, sans que le dossier n’avance pour autant. Cette incongruité avait mené à des mises en garde de la part des grands organismes élus pour représenter la population.
Ces jeunes agissaient alors indépendamment de la stratégie de ces organismes mandatés précisément pour communiquer avec le gouvernement, réduisant par le fait même la légitimité de ces intermédiaires.
C’est précisément ce qui inquiète dans cette tendance : le gouvernement fait déjà la sourde oreille aux propos des organismes et est réticent à communiquer avec les médias.
En appelant ou en envoyant des textos au Premier ministre, on lui donne raison d’adopter ce comportement populiste. On occupe aussi son temps, un temps précieux qu’il pourrait réserver aux consultations avec sa conseillère parlementaire aux affaires francophones ou encore à des entretiens avec le gouvernement fédéral pour trouver des solutions. Quant à notre temps en tant que jeunes citoyens, pourquoi ne pas l’employer à sensibiliser de potentiels alliés anglophones au sujet des enjeux qui touchent l’Ontario français ? Bien entendu, envoyer un texto au Premier ministre requiert moins d’effort que de rédiger une lettre d’opinion ou de rejoindre les rangs d’un organisme qui s’évertue à faire comprendre l’importance de protéger les droits des minorités…Pour faire avancer les choses, optons pour la deuxième option.
Entre-temps, ce sont des centaines de gens mal informés qui se rallient derrière les propos non fondés de personnes comme le Dr Shaver publiés dans le Ottawa Citizen. Le seul avantage à cette éventualité, à la limite, c’est d’attirer l’attention du lectorat vers les enjeux. On peut imaginer que c’est ce que croyait à tort #ONfr en informant tous ses lecteurs de la destination vacances de leur Premier ministre. La vérité, c’est que ce genre de nouvelle contamine l’espace médiatique, contribuant à idiotiser et à distraire la masse des vrais enjeux.