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Aménagement urbain à Ottawa-Gatineau Zibi : un projet de communauté durable contesté

– Par Alex Jürgen Thumm –

Les îles Chaudière et Albert, situées entre les villes d’Ottawa et de Gatineau, seront converties en village urbain, en plus d’être l’« une des communautés, sinon la communauté, les plus durables du monde », selon le promoteur. Quoique le début de la construction débutera dans les mois à venir, le projet, célébré par les politiciens, reste contesté par plusieurs chefs autochtones.

La Commission de la capitale nationale (CCN) a approuvé à l’unanimité le projet du promoteur Windmill, le 20 janvier dernier. Les deux tiers des terrains en question se trouvent au Québec, en faisant ainsi le premier quartier partagé entre les deux provinces.

Il n’est toujours pas clair par quelles mesures concrètes Zibi sera le quartier le plus écologique du monde. Plusieurs des détails sont encore à cristalliser. La construction, qui coûtera 1,2 milliard de dollars, comprend des maisons, des tours à logement et des espaces commerciaux étendus sur 37 acres, dont deux appartiennent au gouvernement fédéral. Le but : un résident pourra y vivre un mois sans voyager à plus d’un kilomètre du site. On y chercherait un équilibre entre emplois et logements.

Au moins trois édifices historiques seront conservés et il y aura des mesures pour favoriser l’agriculture urbaine et la circulation à pied et à vélo. On pourrait même intégrer des « pods » personnels sur rail, type de taxi futuriste automatisé, pour lier les différents lieux du site aux transports en commun des deux provinces. Les automobiles seront permises.

En réponse à des critiques soutenant que le site devrait devenir un espace vert, le promoteur souligne que seul l’investissement privé convient au site en question puisqu’il est contaminé et très toxique. La décontamination qui permettra de rendre les îles « accessibles » au public, pour la première fois en 200 ans, coûtera 125 millions de dollars. Le gouvernement fédéral n’est pas prêt à assumer les coûts. La construction durera 15 ans, mais les premiers espaces commerciaux seront ouverts en 2016.

Endossé par les Algonquins?

Ne laissez pas le nom « Zibi », qui signifie « rivière » en algonquin, ni même le fait que l’affichage de l’éco-quartier sera trilingue, soit algonquin, anglais et français, vous tromper. Le projet ne connaît pas un appui unanime de la part des communautés amérindiennes. Le peuple algonquin réclame le site comme lieu sacré. Gilbert Whiteduck, chef de la réserve de Kitigan Zibi, affirme qu’en tant qu’individu, il n’appuie pas le projet en raison d’un manque de consultation auprès des aînés. « Encore une fois, il s’agit de l’appropriation, par une entreprise, de notre langue anishinaabe », déclare-t-il. La nation de Kitigan Zibi ne s’est toujours pas prononcée officiellement.

Douglas Cardinal, autochtone et architecte du Musée canadien de l’histoire, et Raymond Moriyama, architecte du Musée canadien de la guerre, se joignent aux Algonquins qui revendiquent un contrôle autochtone du site sacré. Les deux architectes ont déposé une plainte officielle auprès du gouvernement de l’Ontario.

Le maire d’Ottawa, Jim Watson, applaudit les peines que s’est données Windmill pour consulter le public. Les promoteurs affirment quant à eux qu’ils ont la confiance de plusieurs Algonquins. « On a beaucoup d’Algonquins qui regardent notre projet avec un œil positif », lance le fondateur de Windmill, Jeff Westeinde. Celui-ci compte embaucher des membres des Premières Nations dans le quartier et construire un centre culturel pour les cérémonies algonquiennes.

Dans un énoncé détaillé sur son site web, Windmill reconnaît que son projet se situe sur un territoire algonquin non cédé, comme l’entièreté des villes d’Ottawa et de Gatineau, et déclare ainsi que ne pas travailler avec les Algonquins « ne ferait que renforcer le long et triste historique d’injustice et irait à l’encontre de notre vision, soit d’intégrer des aspects de la culture et du patrimoine des trois nations fondatrices dans le développement ».

 

« À notre connaissance, nous sommes le seul promoteur immobilier du secteur privé à avoir volontairement mobilisé la nation algonquine et nous aspirons à codévelopper ce qui sera éventuellement reconnu comme étant un nouveau modèle de coopération entre les promoteurs privés et les Premières Nations au Canada », soutient M. Westeinde.

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