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Après-midi causerie avec le diable (Suite)

20 janvier 2014

Illustration de Nicholas DuBois

 

 

 

 

 

 

 

– Par David Beaudin Hyppia –

Farfelue chronique que celle de la semaine dernière, beaucoup disaient qu’il n’avait pas compris le sens ou la raison de ce texte. C’est pourtant bien simple, il n’y en a pas. En fait, oui il y en a un, mais il se situe à l’extérieur du texte. Laissez-moi vous expliquer : Après avoir lu le Manifeste du surréalisme d’André Breton, j’ai constaté qu’il avait compris que la seule forme de liberté totale se trouvait dans l’imaginaire. Il arrivait à la même conclusion que bien des penseurs anarchistes de la pensée de la libération de l’imaginaire. Ces mêmes conclusions me semblent de plus en plus rationnelles. Si briser une fenêtre reste illégal, l’imaginer ne l’est toujours pas.

L’imaginaire transmet un message qui prend forme, le plus souvent, dans l’art. André Breton l’avait bien compris. En libérant l’imaginaire, on engendre pas seulement la différence, mais la possibilité. C’est cette possibilité qui, prenant forme dans l’imaginaire, vient à faire réaliser que ce que l’on voit, comprend, ou encore cogite d’un phénomène n’est qu’une seule possibilité parmi tant d’autres, et donc que la réalité qui s’affiche devant peut devenir autre chose si on le veut. Mon texte après-midi causerie avec le diable pointait dans cette direction.

La mise en situation incongrue permet de créer une toute autre compréhension d’un phénomène qui se produit dans la réalité. Un phénomène prenant place dans la réalité même est conditionné par un minimum d’acceptation de cette réalisation. Ce que je veux dire par là, c’est que mon texte prend place dans un ensemble de contextes qui peuvent être compris par tous ceux qui connaissent le diable, par exemple. Une conversation avec le diable en joual devient extraordinaire lorsqu’on entre dans l’histoire totalement ; on doit commencer à questionner tout ce qui se produit en continuant la logique interne qui est créée par l’auteur.

Voici donc la suite et la fin :

J’sais pas quoi penser sérieux, wow… J’me demande vraiment qu’est-ce que le diable dirait si je lui demandais comment c’était avant, avant tout ça. Lucifer c’était quand même l’ange favori de Dieu, c’était le meilleur des archanges. Peut-être que le diable finalement, y joue un rôle qu’y peut pas dévoiler. Dans une logique manichéenne, l’équilibre se fait à partir de deux opposés. Je suis certain que seul Lucifer pouvait devenir l’incarnation du mal, justement parce qu’il était le meilleur des anges. Dieu a dû le choisir et lui dire qu’il voulait qu’il devienne le mal, seulement parce qu’il savait qu’il allait comprendre son rôle dans l’univers. Lucifer a dû trouver ca difficile de devoir quitter le paradis, ça doit être étrange de devoir faire le mal quand on est le deuxième représentant du bien après Dieu.

À ce moment-là, la serveuse vient me voir et me demande si je veux quelque chose d’autre à boire sur un ton mielleux. Je lui réponds que non, mais que je vais prendre l’addition. Elle sourit et se dirige vers la table voisine.

Elle est vraiment belle la serveuse, elle m’a souri. Heille, elle a souri à l’autre gars à la table là-bas aussi, j’me sentais spécial pour un petit bout mais non finalement… Ça me donne une idée. Je suis sûr que le diable était le meilleur des anges parce qu’il était tellement en adoration avec Dieu et qu’il voulait toujours que Dieu le regarde. Mais Dieu a dû lui dire qu’il ne pouvait pas lui prêter plus d’attention à lui qu’à ces autres créations. Et le diable l’a pas pris. Ahah, le diable était en amour avec Dieu. C’est pour ça qu’il est obsédé avec lui! Il arrêtait pas de parler de Dieu de façon péjorative, mais finalement, c’est toujours lui qui est au cœur de ce qu’il dit. Le diable est en peine d’amour. Damn, ça c’est étrange.

La serveuse revient vers moi. « Le gars avec qui t’étais t’à l’heure, y’avait comme un p’tit look diabolique dans ses yeux. »

« Ahah ouais, c’était le diable. »

« Hé ben… »

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